Trump défie encore un peu plus Pyongyang
Écrit par Jonathan PIRIOU sur août 11, 2017
Les options militaires sont maintenant bien en place », a déclaré le président américain à l'adresse de son homologue nord-coréen.
Face à la guerre des mots et des nerfs qui oppose Washington et Pyongyang, le monde entier s'inquiète, craignant un enchaînement fatal. Mais Donald Trump poursuit sa rhétorique guerrière. «Les options militaires sont maintenant bien en place, bouclées et prêtes à être mises en action si la Corée du Nord agissait imprudemment. Il faut espérer que Kim Jong-un choisira un autre chemin», a-t-il tweeté ce vendredi matin.
Jeudi après-midi déjà, il avait persisté et signé dans sa posture menaçante, estimant que ceux qui critiquaient ses paroles avaient tort. N'êtes-vous pas trop dur?, ont demandé les journalistes, après ses promesses de déclencher «le feu et la colère» si Pyongyang persistait à menacer le territoire américain. «Peut-être que ma déclaration n'était pas assez dure», a-t-il rétorqué. Les Nord-Coréens ont bravé «notre pays depuis longtemps et il est temps que quelqu'un s'implique pour les gens de ce pays et pour les peuples des autres pays», a dit Trump. Les présidents américains «ont négocié depuis vingt-cinq ans. Regardez Clinton. Il s'est couché pendant ses négociations. Il était faible et inefficace. Regardez ce qui s'est passé avec Bush… avec Obama. Lui ne voulait même pas en parler. Moi je parle. Il est temps», a-t-il insisté.
Menace sur Guam
Durant sa campagne, son instinct du rapport de force a presque toujours conduit Donald Trump à choisir la contre-attaque et la montée aux extrêmes rhétoriques, sans céder un pouce. Appliquant une recette de la théorie des jeux, enseignée aux experts de la dissuasion nucléaire comme aux joueurs de poker, il cherche à convaincre Kim Jong-un et ses protecteurs chinois qu'il ne bluffe pas quand il dit qu'il n'acceptera jamais une nucléarisation de la Corée du Nord mettant le territoire américain à portée de ses missiles. Le président des États-Unis semble vouloir profiter de son image de leader impulsif pour donner de la crédibilité à son propos. Son calcul pourrait être de pratiquer le bras de fer «au bord du gouffre», comme Kennedy l'avait fait pendant la crise de Cuba, pour convaincre les Chinois de pousser Pyongyang à lâcher prise sur la nucléarisation. En échange d'une mission de bons offices chinois, qui réglerait le problème, Trump suggère de ne pas lancer sa guerre commerciale contre Pékin et il a chargé le secrétaire d'État Rex Tillerson de proposer l'ouverture de négociations directes avec Pyongyang, qui viseraient à offrir au régime communiste des avantages ainsi que l'assurance de ne rien faire pour le faire tomber.
Mais si Trump se trompe sur la psychologie de Kim – ou sur les capacités d'influence de Pékin – et déclenche, par son poker nucléaire, une escalade incontrôlable? La question se pose alors que la Corée du Nord a pour l'instant choisi la surenchère, menaçant de lancer une attaque contre l'île américaine de Guam, dans le Pacifique. L'armée de Pyongyang a annoncé qu'elle tiendrait prêt un plan d'offensive contre Guam d'ici à la mi-août. Ce plan prévoirait de tirer 4 missiles au-dessus du Japon, qui en 17 minutes et 45 secondes iraient «s'écraser en mer à 30 ou 40 km de l'îleaméricaine». Le danger, affirment analystes et politiques, serait que Kim décide, sur un coup de tête, de tester sa crédibilité en effectuant des tirs vers Guam. Quelles seraient alors les options militaires d'un président américain qui serait forcé de réagir pour ne pas perdre la face? Pourrait-il porter un coup au régime nord-coréen sans faire basculer la région dans la guerre totale? Inquiets, 60 députés ont envoyé une lettre au secrétaire d'État Rex Tillerson pour dénoncer «les déclarations irresponsables et dangereuses» de Trump. À l'étranger, la Russie s'est dite «très inquiète» des risques «très élevés de conflit». Berlin a dit ne pas voir de «solution militaire» à l'affaire et les Chinois ont appelé les deux parties à la «prudence». Mais Donald Trump est impavide.