Syrie : Raqqa sur le point de tomber, des djihadistes vont être évacués
Écrit par Jonathan PIRIOU sur octobre 14, 2017
Un "convoi" devait quitter samedi Raqa en vertu d'un accord sur des évacuations de cette ville du nord de la Syrie où des combattants antidjihadistes soutenus par Washington étaient en passe de conquérir les derniers réduits du groupe Etat islamique (EI). Des djihadistes, syriens et étrangers, sont concernés par l'accord d'évacuation conclu pour Raqa, selon un responsable local. Ces derniers jours, des discussions étaient menées à Raqa pour assurer la reprise de ces réduits et permettre l'évacuation des civils, parfois utilisés comme boucliers humains. Les négociations étaient conduites par le Conseil civil de Raqa, une administration locale liée aux Forces démocratiques syriennes (FDS), alliance de combattants antidjihadistes kurdes et arabes soutenue par la coalition, et des figures tribales.
Trois ans après sa fulgurante ascension en Irak et en Syrie, l'EI se trouve acculé dans ses derniers fiefs et voit son "califat" autoproclamé en 2014 s'écrouler face aux offensives soutenues par les Etats-Unis ou la Russie. Les djihadistes ont ainsi perdu samedi leur fief de Mayadine, dans la province de Deir Ezzor (Est), face à une offensive du régime syrien soutenu par l'aviation de Moscou. Et à Raqa, cela fait plusieurs semaines qu'ils ne contrôlent plus que quelques réduits, alors que les FDS ont progressivement repris près de 90 % de la ville.
Trêve tacite
"Les gens qui quittent Raqa en vertu de l'accord seront fouillés" et leur identité sera vérifiée, selon le communiqué de la coalition. Auparavant, la coalition avait indiqué qu'une centaine de djihadistes s'étaient rendus ces dernières 24 heures, sans toutefois évoquer leur nationalité. Quelque 1 500 civils ont déjà pu fuir cette semaine en vertu d'une trêve tacite accompagnant les négociations, selon la coalition qui avait parlé jeudi d'environ 4 000 civils encore à Raqa. Et des djihadistes syriens se sont rendus dans la nuit, a dit pour sa part un responsable local qui n'a pas donné de chiffre exact. "Ceux qui se sont rendus sont des locaux, pas des étrangers. Les étrangers ne se sont pas encore rendus", a précisé le responsable s'exprimant sous l'anonymat.
Une source militaire des FDS a indiqué à l'Agence France Presse que des bus et des camions attendaient à l'extérieur de Raqa pour conduire les combattants ayant déposé les armes vers la province de Deir Ezzor, encore largement contrôlée par l'EI. De son côté, l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) a assuré que plus aucun djihadiste syrien ne se trouvait à Raqa. Et les quelque 150 combattants étrangers qui y sont retranchés "demandent à pouvoir partir en un seul groupe vers les secteurs sous contrôle de l'EI dans la province de Deir Ezzor", a-t-il précisé. C'est notamment de Raqa qu'auraient été planifiés les spectaculaires attentats de l'EI qui ont frappé l'Europe ces dernières années.
"Zone de désescalade"
Cet été, une évacuation de djihadistes depuis la région frontalière entre le Liban et la Syrie vers la région de Deir Ezzor (est) avait déjà suscité des réactions hostiles de la part de la coalition, qui avait lancé des raids pour empêcher un convoi d'arriver près de l'Irak. D'autre part, Damas a réclamé samedi le "retrait immédiat" des forces turques déployées dans le nord-ouest de la Syrie où une "zone de désescalade" doit être instaurée dans la province d'Idleb. Ces troupes ont été déployées dans le cadre d'un accord conclu entre d'un côté Ankara, soutien des rebelles, et de l'autre Moscou et Téhéran, parrains du régime syrien, prévoyant l'instauration de "zones de désescalade" où les pays garants s'engagent à mettre fin aux combats. La province d'Idleb échappe au régime de Bachar al-Assad et est contrôlée par Tahrir al-Cham, une coalition djihadiste composée essentiellement de l'ex-branche d'Al-Qaïda dans le pays.