Les syndicats se sont réunis… mais n’ont pas décidé d’une action
Écrit par Jonathan PIRIOU sur octobre 9, 2017
Les syndicats de salariés se sont réunis ce lundi soir pour évoquer leur stratégie, alors que la contestation contre les ordonnances s'essouffle. Si la CGT veut persévérer et s'appuyer sur la «convergence des luttes», les deux autres grandes organisations, CFDT et FO, préfèrent se concentrer sur les prochaines négociations syndicales.
Tout le gotha du syndicalisme français a répondu présent. La CGT, la CFDT, FO, la CFE-CGC, la CFTC, Solidaires, l'Unsa, la FSU, ainsi que des organisations de jeunesse s'étaient donner rendez-vous ce lundi àsoir, pour discuter d'une action unitaire face aux différentes réformes prévues par le gouvernement. Alors que demain mardi, les fédérations du service public organisent une grève des fonctionnaires et un défilé dans plusieurs villes de France, les syndicats n'ont pas réussi à arrêter une «vision commune» des actions à mener pour peser sur les réformes et se reverront le 24 octobre pour une «analyse partagée sur le fond des dossiers», a annoncé Véronique Descacq (CFDT), à l'issue de l'intersyndicale au siège de la CGT. «Il n'y avait pas de vision commune des actions à mener pour peser sur les événements en cours ou futurs», a déclaré la représentante de la CFDT, après près de deux heures de réunion avec tous les syndicats. «On a convenu une prochaine rencontre, une fois que chaque organisation aura rencontré le président de la République d'une part et le Premier ministre d'autre part, dans l'espoir d'en savoir plus sur les intentions du gouvernement», a-t-elle expliqué.Pourtant, pour Philippe Martinez, le leader de la CGT, la stratégie syndicale des prochaines semaines coulait de source avant la réunion: il faut «faire converger tous les mécontentements», déclarait-il. La Confédération avait même un objectif concret, celui d'organiser «une grande journée solidaire, rassemblant les fonctionnaires, les salariés du privé, les retraités, les étudiants», comme l'affirmait son secrétaire général. Bref, réunir toutes les sensibilités rétives aux réformes, et les mettre dans la rue pour lancer une contestation globale. Le syndicaliste s'inspirait du mouvement unitaire des routiers en septembre, qui a inquiété le gouvernement et obtenu de bons résultats sur l'application des ordonnances: «ce qu'ont démontré les routiers, ça peut être fait un peu partout dans les entreprises».
La CFDT et FO préfèrent «peser sur le réel»
Reste que l'unité s'annonce ardue au-delà des événements ponctuels comme la journée de demain. En l'absence d'un véritable casus belli, les deux autres grands syndicats, CFDT et FO, s'ils ont répondu sans sourciller à l'invitation de la CGT ce soir, ils n'ont pas semblé séduits par sa proposition d'un octobre rouge.
Du côté de la CFDT, le ton est pour le moins circonspect. Pour Laurent Berger, invité de RTL ce lundi matin: «La loi travail se joue dans l'écriture des décrets, pas principalement dans la rue». Les bienfaits de la manière forte? «le syndicalisme de la CFDT, c'est de peser sur le réel», poursuit-il. En d'autres termes: niet pour la révolte dont certains peuplent leurs rêves.
57% des Français déclarent soutenir les grèves et les manifestations contre les ordonnances
Sondage Harris Interactive pour LCP
Chez FO, Jean-Claude Mailly, qui a reçu un mandat impératif pour l'organisation d'une journée de mobilisation, s'empressait aussi ce matin de préciser sur RMC qu'il ne s'agit «pas d'un mandat de retrait des ordonnances». Le «parlement» de FO souhaitait simplement un «calendrier plus serré» pour contester certains points du texte, mais pas question de revenir sur toute la négociation de l'été, qui a remis FO sur la voie du réformisme. Le secrétaire général a construit sa stratégie en se souvenant de la contestation du gouvernement Valls: «sur la loi El Khomri, on a obtenu deux bricoles, je le dis», avouant sa préférence pour le dialogue. L'heure n'est plus aux grands combats, et les temps ont changé: «on n'est plus dans le même contexte que l'année dernière, avec un président en fin de course. En plus, Emmanuel Macron parle cash, et ça j'aime bien» avoue même le leader de FO, qui a vu passer quatre chefs de l'État différents.
Il semblerait toutefois que l'opinion publique soit en désaccord avec les deux présidents de syndicats. À en croire un sondage Harris Interactive pour LCP publié lundi, près de six Français sur dix (57%) déclarent soutenir les grèves et les manifestations contre les ordonnances réformant le Code du travail. Plus de deux semaines après l'entrée en vigueur des ordonnances, les Français affichent une hostilité croissante envers la réforme. Ils sont désormais 65% à affirmer leur opposition, contre 58% lors du précédent sondage Harris publié le 1er septembre.