Mort de George Floyd : des manifestations à travers les Etats-Unis malgré l’inculpation d’un policier
Écrit par Jonathan PIRIOU sur mai 30, 2020
Après plusieurs jours d’émeutes, des manifestations ont éclaté dans plusieurs grandes villes américaines vendredi 29 mai dans la soirée après la mort en début de semaine de George Floyd, un Afro-Américain de 46 ans, et ce malgré l’inculpation pour homicide involontaire du policier arrêté.
« Le policier impliqué, qui a été identifié comme Derek Chauvin, a été placé en détention » par la police criminelle, avait déclaré plus tôt vendredi le commissaire John Harrington, du département de la sécurité civile de l’Etat du Minnesota. Le procureur du comté de Hennepin, où se trouve la ville de Minneapolis, a annoncé que ses services l’inculpaient d’acte cruel et dangereux ayant causé la mort et d’homicide involontaire. Des poursuites devraient être engagées contre les trois autres policiers.
La famille de George Floyd a salué cette arrestation, un premier pas sur « la voie de la justice », même si elle l’a jugée « tardive » et insuffisante. « Nous voulons une inculpation pour homicide volontaire avec préméditation. Et nous voulons voir les autres agents [impliqués] arrêtés », a-t-elle affirmé dans un communiqué. Le président américain, Donald Trump, qui s’est entretenu avec elle, a déclaré : « La famille de George a droit à la justice. Les habitants du Minnesota ont droit à la sécurité. » George Floyd est mort, lundi soir, juste après avoir été arrêté par la police, qui le soupçonnait d’avoir voulu écouler un faux billet de 20 dollars. Lors de l’intervention, il a été plaqué au sol par un agent qui a maintenu son genou sur son cou pendant de longues minutes. « Je ne peux plus respirer », l’entend-on dire : la scène, filmée par un témoin, est difficilement soutenable.
Dans la foulée, les quatre agents impliqués ont été licenciés et des enquêtes fédérales et locales ont été ouvertes pour établir leur responsabilité. Mais aucune arrestation n’avait encore eu lieu, ce qui alimente toutes les frustrations.
Cette nouvelle affaire rappelle notamment la mort d’Eric Garner, un homme noir décédé en 2014 à New York après avoir été asphyxié lors de son arrestation par des policiers blancs. Lui aussi avait dit « je ne peux pas respirer », une phrase devenue un cri de ralliement du mouvement Black Lives Matter (« La vie des Noirs compte »)
- Le couvre-feu bravé à Minneapolis
Cinq cents soldats de la garde nationale de l’Etat du Minnesota ont été déployés à la demande du gouverneur, vendredi matin (heure de Minneapolis), pour rétablir le calme sur place et épauler deux cents policiers de l’Etat, ainsi que des hélicoptères, qui devaient également être envoyés sur place.
Dans la nuit de jeudi à vendredi, les manifestations ont tourné à l’émeute aux abords du commissariat où travaillaient les quatre hommes. Confrontées à l’avancée des manifestants, les forces de l’ordre avaient abandonné les lieux vers 22 heures. Certains manifestants ont alors réussi à forcer les barrières de sécurité, à briser les vitres et à mettre le feu au bâtiment.
Plusieurs boutiques des alentours ont connu un sort comparable et les violences ont également gagné certains quartiers de la ville voisine de Saint Louis, avec des heurts sporadiques entre policiers et habitants.
Les manifestations avaient auparavant été majoritairement pacifiques, avec des foules contenues par des chaînes d’hommes en uniforme. Le défilé avait commencé en fin d’après-midi, avec de nombreux manifestants portant un masque pour se protéger du coronavirus. Dans la ville voisine de Saint Paul, la police faisait état de dégâts et de vols. « Nous savons qu’il y a beaucoup de colère. Nous savons qu’il y a beaucoup de blessures. Mais nous ne pouvons tolérer que certains s’en servent comme occasion pour perpétrer des délits », a déploré le directeur de la police de cette ville, Todd Axtell.
Pour apaiser la situation, Jacob Frey, le maire de Minneapolis, a décrété un couvre-feu pour toute la ville. A partir de 20 heures locales (3 heures du matin à Paris samedi) jusqu’à 6 heures le lendemain matin, les rues de la ville devaient être désertées, à l’exception des forces de l’ordre, des pompiers et du personnel médical. Mais il a été bravé par des manifestants qui ont subi des tirs de gaz lacrymogènes.
- Manifestations dans tout le pays
Outre l’Etat du Minnesota, des manifestants ont bloqué une autoroute à Denver, dans le Colorado, une autre à Columbus, dans l’Ohio. D’autres ont défié les ordres de confinement à New York et Chicago.A Los Angeles, des manifestants ont bloqué brièvement une autoroute et brisé les vitres de deux véhicules de police.
Vendredi soir, des centaines de personnes ont manifesté devant la Maison Blanche à Washington pour exprimer leur colère. A Détroit, une personne a été tuée par balles après qu’un homme, au volant de son véhicule, a tiré dans un groupe de manifestants, selon l’agence de presse AP. La police n’est pas impliquée, d’après les autorités locales. A Atlanta, des véhicules de patrouille de la police ont été brûlés