Le Parlement européen condamne l’usage des LBD par la police
Écrit par Jonathan PIRIOU sur février 14, 2019
En plein mouvement des « gilets jaunes » en France et de critiques récurrentes contre l’usage des lanceurs de balles de défense (LBD) par les forces de l’ordre, le Parlement européen a largement condamné, jeudi 14 février, « le recours à certains types d’armes à létalité réduite par les forces de police contre des manifestants pacifiques, comme les projectiles à impact cinétique » – dont les LBD font partie. La résolution « sur le droit à manifester pacifiquement et l’usage proportionné de la force » a été votée par 438 députés européens, 78 autres se prononçant contre et 87 s’étant abstenus.
Le texte, condamnant plus largement « le recours à des interventions violentes et disproportionnées de la part des autorités publiques lors de protestations et de manifestations pacifiques », ne cible pas un Etat membre en particulier, mais a donné lieu en préambule dans l’hémicycle strasbourgeois à un débat animé auquel ont pris part plusieurs eurodéputés français. Certains, comme le groupe politique de La France insoumise, ont déploré que la résolution ne demande pas l’interdiction des LBD.
Reconnaissant que « la police, qui a compté elle aussi de nombreuses victimes dans ses rangs, travaille dans des conditions difficiles, compte tenu notamment de l’hostilité dont font preuve certains manifestants, mais également de la charge de travail excessive », le texte demande aux Etats membres :
- de « veiller à ce que le recours à la force par les services répressifs soit toujours légal, proportionné et nécessaire, qu’il ait lieu en ultime recours et qu’il préserve la vie et l’intégrité physique des personnes » ;
- de « faire en sorte que toutes les armes fassent l’objet d’évaluations et d’essais indépendants avant leur mise sur le marché » ;
- de collecter « des preuves concernant le recours, le recours abusif, les conséquences inattendues, les blessures et les décès ainsi que leurs causes » dus aux armes utilisées par les forces de l’ordre ;
- de « recourir à des pratiques alternatives qui ont déjà fait leurs preuves, notamment celles qui permettent d’éviter tout contact physique avec les manifestants et qui font appel à des médiateurs ».
Surenchère de violence »
Le débat, demandé par une coalition regroupant l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates (S&D), les Verts et la GUE (Gauche unitaire européenne), avait été lundi soir dominé en partie par la situation en France avec les manifestations des « gilets jaunes », même s’il fait référence à d’autres pays (Roumanie, Espagne, Hongrie, Grèce).
L’eurodéputé écologiste français Yannick Jadot a notamment dénoncé l’usage des LBD, qui a causé de nombreuses blessures graves et qui fait même débat au sein des forces de l’ordre.
« Il n’y a qu’en France, en Pologne et en Grèce qu’il y a un usage sans limite de ces instruments qui (…), selon les équipes médicales, causent des blessures de guerre. »
Pour les eurodéputés français de Génération.s (groupe S&D), « le président de la République française doit entendre l’alerte du Parlement européen et revoir sa politique de maintien de l’ordre, qui conduit à une surenchère de violence ».
« Je m’inquiète pour mon pays, je m’inquiète pour les libertés en France et je m’inquiète du basculement autoritaire du président Macron », a lancé Younous Omarjee, de La France insoumise (GUE).
Le président des Patriotes, Florian Philippot, l’ancien bras droit de Marine Le Pen, s’est présenté dans l’hémicycle en gilet jaune, la main sur un œil pour symboliser les blessés au cours des manifestations, et a dénoncé « un pouvoir aux abois [qui] donne des ordres délirants, irresponsables, insensés contre sa propre population ».
L’élu du parti français Les Républicains Renaud Muselier a quant à lui comparé le président Emmanuel Macron à « Jupiter revenu sur terre », lui reprochant des concessions aux « gilets jaunes », « au détriment des règles budgétaires européennes ».