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Comment Jared Kushner, le gendre de Donald Trump, est devenu l’éminence grise du président américain

Écrit par sur janvier 15, 2017

Il est riche, ambitieux et audacieux, comme son beau-père, mais ceux qui le connaissent décrivent une personnalité beaucoup plus douce et réservée que celle de "The Donald". Jared Kushner, jeune magnat de l'immobilier et époux d'Ivanka, la fille ainée du président élu, devrait arriver à la Maison Blanche le 20 janvier, dans les bagages de Donald Trump. Ce dernier lui a offert le poste de haut conseiller de la présidence, la veille de ses 36 ans, lundi 9 janvier. Un beau cadeau qui vient récompenser la loyauté de ce gendre discret mais redoutable. 

Plus jeune membre de l'équipe nommée par Donald Trump pour l'aider à diriger les Etats-Unis, cet "autre héritier" du clan Trump (le président élu est père de deux filles et de trois garçons) n'avait aucune expérience politique avant de devenir le cerveau de la campagne victorieuse de son beau-père. Franceinfo raconte comment cet homme de l'ombre s'est rendu indispensable au royaume du bling-bling.

Grâce à son culot (et son entregent)

Quelques jours après son élection, le 17 novembre, Donald Trump a visité la Maison Blanche avec son cercle rapproché. Dans les bureaux de l'aile Ouest, le centre névralgique du pouvoir américain, Jared Kushner a demandé, curieux : "Combien de personnes ici resteront travailler pour l'administration suivante ?" La question, inattendue, n'a pas manqué de faire lever les sourcils des employés de Barack Obama, raconte le Los Angeles Times. Et pour cause, comme chacun le sait – du moins à Washington –, les présidents sortants embarquent à leur départ la quasi-totalité de leur staff. C'est le b.a.-ba. L'anecdote, un brin embarrassante, révèle pourtant un style "Kushner" : dans le petit monde de l'immobilier new-yorkais, on dit de lui qu'il opère "comme un novice qui fait confiance à son propre jugement et à sa vision et qui ne craint pas de foncer même s'il n'y connaît pas grand-chose – un peu comme son beau-père", analyse Politico.

Ce mélange de culot et de confiance, Jared Kushner le doit à son histoire personnelle : héritier lui-même d'un magnat de l'immobilier, il grandit dans le luxe, dans le New Jersey, avant d'intégrer la prestigieuse école d'Harvard. Dans son livre daté de 2006, The Price of Admission, le journaliste Daniel Golden relève pourtant que le jeune Jared est loin d'être un lycéen brillant. Grand privilégié, il est admis après que ses parents ont fait un don de quelque 2,5 millions de dollars à l'université, explique le journaliste dans le Guardian, tout en précisant que les Kushner nient en bloc tout lien de cause à effet.

Mais, étudiant, il est contraint de se frotter plus vite que prévu au business de l'immobilier. En 2005, son père, Charles Kushner, écope de deux ans de prison pour évasion fiscale, subordination de témoin et financement illégal de campagne pour le camp démocrate, à l'issue d'un scandale qui met à jour dissensions et trahisons au sein même de la famille Kushner. Propulsé "PDG par accident" de l'empire familial à moins de 25 ans, l'héritier va, contre toute attente, faire ses preuves. En 2006, il fait l'acquisition du New York Observer, un journal de Manhattan pour lequel il débourse 10 millions de dollars. Exaspéré devant ce gamin "qui ne sait pas ce qu'il ne sait pas", le rédacteur en chef historique claque la porte, mais le journal se maintient, notamment en investissant dans le numérique. L'année suivante, la firme des Kushner s'empare du building le plus cher de Manhattan, au numéro 666 de la prestigieuse Cinquième avenue, où il installe son bureau. Quarante-et-un étages acquis pour la coquette somme de 1,8 milliard de dollars, selon le New York Times. Une folie des grandeurs et une soif de pouvoir qui n'est pas sans rappeler un certain Donald Trump.

Avec une habile dose de charme 

En décembre, soit quelques jours après l'élection de Donald Trump, Jared Kushner rend visite à quelque 400 dirigeants d'entreprises rassemblés dans le hall de l'établissement bancaire Morgan Stanley pour leur parler de son beau-père. Avec l'aisance polie et décontractée d'un animateur de conférence, le trentenaire rejoue le numéro qu'il connaît par cœur : dédiaboliser le prochain président américain et arrondir les angles. Selon le compte-rendu du New York Magazine, Jared Kushner jure que l'administration de son beau-père agira raisonnablement en matière d'immigration et saura investir conjointement avec les démocrates pour rénover les infrastructures des Etats-Unis. Un discours rassurant – au moins pour les marchés financiers –, martelé par cet improbable conseiller du candidat républicain, pourtant issu d'une famille qui a arrosé le camp adverse pendant des décennies.

Jared Kushner a observé son père jouer les faiseurs de rois dans le parti démocrate du New Jersey. Ivanka Trump, elle, est en bon terme avec Chelsea Clinton, la "fille de". Le couple, qui s'est marié en 2009, passe donc pour un îlot progressiste au sein d'une galaxie Trump conservatrice et populiste. En faveur des droits des homosexuels, Jared Kushner et Ivanka Trump compensent en déclarations bienveillantes les sorties souvent outrancières du patriarche. Même Rosie O'Donnell, l'humoriste et animatrice haïe par Donald Trump, s'est fendue de compliments après avoir rencontré le couple par hasard dans un restaurant. Dans un poème (oui, un poème), elle évoque le "calme charmant" d'un Kushner "chaleureux et gracieux", résume le Hollywood Reporter. Le couple modèle, parents de trois enfants, est "si présentable que cela en est presque inquiétant", relève en effet le New Yorker. Selon le magazine, elle est attentionnée et brillante, lui à l'écoute et serviable.