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Guyane: les négociations repartent après les “excuses” d’Ericka Bareigts

Écrit par sur mars 31, 2017

Cayenne (AFP) – Les négociations visant à sortir la Guyane de dix jours de conflit social, qui avaient démarré dans une ambiance très lourde, sont reparties du bon pied après que la ministre des Outre-mer Ericka Bareigts a adressé ses "excuses" au peuple guyanais.

"Au bout de tant d'années, c'est à moi que revient l'honneur de dire, au-delà de ma petite personne, au-delà des fonctions, toutes mes excuses au peuple guyanais", a lancé la ministre au mégaphone depuis le perron de la préfecture de la Guyane, en référence à des années de sous-investissement de Paris dans ce territoire.

En contrebas, les centaines de personnes qui avaient manifesté leur méfiance à son égard, ainsi qu'à celui du ministre de l'Intérieur Matthias Fekl, ont applaudi et poussé des cris de joie.

Critiquée pour avoir tardé à venir en Guyane, malgré l'importance du mouvement social, Mme Bareigts s'était déjà excusée quelques minutes plus tôt devant une délégation d'une cinquantaine de Guyanais que M. Fekl et elle-même avaient reçue.Si j'ai blessé la Guyane, je ne sais de quels maux, mais si j'ai blessé la Guyane, alors ça ne sera pas moi, Ultramarine, qui reculera devant des excuses, a-t-elle déclaré. Pour beaucoup de choses, si on s'était excusé, peut-être qu'on aurait avancé beaucoup plus sereinement et qu'on n'en serait pas arrivé là aujourd'hui".

Ces excuses officielles ont fortement inversé la tendance à Cayenne, où le déplacement des deux ministres, arrivés mercredi soir, s'était fait dans une ambiance électrique.

"Madame la ministre de l'Outre-mer, le peuple guyanais vous demande de vous excuser. Nous pouvons pardonner les bêtises mais pas le mépris", avait notamment lancé Gaëlle Lapompe Paironne, membre de la délégation reçue en préfecture, à Ericka Bareigts .

Après qu'elle se fut exécutée, ce qu'elle s'était refusée à faire dans un premier temps, Mme Lapompe Paironne s'est jetée dans les bras d'Ericka Bareigts, d'après une vidéo de la scène qu'a pu voir l'AFP.

"Il s'est passé quelque chose de fort. Les conditions de la confiance sont là", s'est félicité le ministre de l'Intérieur, lors d'un entretien avec l'AFP et Le Monde.

– 'Veille ministérielle' –

Alors que la délégation guyanaise a apporté plus de 400 pages de propositions aux deux membres du gouvernement, une "veille ministérielle" a été mise en place à Paris pour "parvenir à des arbitrages" sur les principaux points, a assuré Matthias Fekl, qui compte apporter des réponses au collectif "samedi" au plus tard, a-t-il déclaré.

La Guyane connaît depuis une dizaine de jours un mouvement de contestation d’une ampleur historique, sur fond de revendications sécuritaires, économiques et sociales.

Mardi, ce département a connu "la plus grosse manifestation de son histoire", de l'aveu même de la préfecture, avec près de 15.000 marcheurs sur une population de 250.000 habitants. Les 37 syndicatsmembres de l'Union des travailleurs guyanais (UTG) avaient voté samedi à la quasi-unanimité la grève générale illimitée qui a commencé lundi.

"Le gap qui s'est créé dans les cinq à dix ans précédant (la mandature socialiste) est très difficile à combler", a observé Ericka Bareigts, pour qui tous les ans sous la présidence de Nicolas Sarkozy "on enlevait des professeurs" ou des effectifs de police dans l'Outre-mer.

L'exécutif a déjà validé un certain nombre de mesures pour répondre aux exigences populaires, telle la création d’un Tribunal de grande instance et d’un centre pénitentiaire à Saint-Laurent du Maroni, la deuxième ville du territoire, ainsi que la suspension de la cession du centre médical de Kourou.

Le préfet Jean-François Cordet, qui pilote une mission de hauts fonctionnaires envoyée par Paris, active depuis samedi, avait annoncé, entre autres, "la fidélisation d’un escadron de gendarmes mobiles à Cayenne". Ericka Bareigts et la ministre de la Santé Marisol Touraine ont validé mercredi une aide de fonctionnement exceptionnelle de 20 millions d’euros à l'hôpital de Cayenne, en difficulté financière.

Selon le site du quotidien Les Echos mercredi, les ministres "seraient en mesure de poser sur la table des négociations un pacte de développement de la Guyane de quatre milliards sur un peu moins de 10 ans". Des informations aussitôt démenties par Matignon.

Les ministres ne sont partis avec "aucune enveloppe prédéterminée. On ne travaille pas comme ça. On travaille avec les acteurs à des mesures utiles pour la Guyane, pas sur des chiffres fantaisistes et inventés", selon Matignon

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