Guerre en Ukraine. Poutine sème la zizanie en Bulgarie

L’arrêt de la fourniture de gaz russe à la Bulgarie, le 27 avril 2022, coïncide avec une visite du Premier ministre Kiril Petkov à Kiev. Manière pour Gazprom, bras armé de Moscou, de mettre la pression sur le fragile gouvernement de Sofia. Le réformateur europhile Petkov veut fournir une aide militaire à l’Ukraine. Mais ses très russophiles alliés socialistes refusent et menacent de quitter la coalition au pouvoir et de provoquer des législatives anticipées.En coupant le gaz à la Pologne et à la Bulgarie, le géant russe Gazprom, bras gazier du Kremlin, n’a pas ciblé au hasard. Moscou « punit » Varsovie, capitale européenne la plus virulente à son encontre et tente de fragiliser la Bulgarie, maillon faible de l’Otan. Sofia n’est pas seulement très dépendante de Gazprom – 75 % à 90 % de ses approvisionnements. Elle est gouvernée par une coalition que la guerre en Ukraine tire à hue et à dia.

Avec la Hongrie, la Bulgarie sourde aux appels à l’aide de Zelensky

La fermeture du robinet russe est intervenue au moment précis où Kiril Petkov, le Premier ministre réformateur et europhile, partait pour Kiev à la tête d’une « mission d’évaluation » des besoins de l’Ukraine. Il espérait y emmener des représentants de toutes les composantes de sa majorité, afin de les convaincre de fournir des armes au pays agressé – la Bulgarie est le seul pays de l’UE, avec la Hongrie de Viktor Orban, à rester sourd aux appels à l’aide de Volodymyr Zelensky.

Mais le Parti socialiste bulgare (PSB, ex-communiste) a boycotté le voyage. Le très russophile PSB rejette la fourniture ne serait-ce d’une seule cartouche ​à Kiev. Sa cheffe Kornelia Ninova, ministre de l’Économie, claquerait sinon la porte de la coalition et provoquerait des législatives anticipées.

Fournitures d’armes en douce

Malgré les démentis de façade, il semble bien que l’Ukraine obtienne en douce les armes légères et les munitions de type soviétique que des fabricants bulgares continuent de produire en quantité. Selon le magazine Kapital et le site Dnevnik, des intermédiaires ont obtenu des licences d’exportation vers des pays tiers et des cargaisons sont parties pour Rzeszow, la ville du sud de la Pologne par où transite l’aide de l’Otan à Kiev.

L’Azerbaïdjan à la rescousse

Reste que le gaz n’est peut-être déjà plus un levier suffisant pour pressurer Sofia. Cet automne sera mis en service – avec retard — une connexion de 182 km reliant le réseau bulgare au gros gazoduc qui passe par Komotini (Grèce) et achemine le gaz de l’Azerbaïdjan vers l’Italie. Cela libérera la Bulgarie de la dépendance russe. Sofia et Bakou ont déjà conclu un marché pour couvrir 30 % des besoins bulgares. Et l’Azerbaïdjan se dit prêt à fournir beaucoup plus.