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Grave erreur », « faute » : les dirigeants mondiaux sévères après le retrait américain de l’accord de Paris

Écrit par sur juin 2, 2017

Il a été le premier à réagir. L’ancien président démocrate Barack Obama, qui avait ratifié fin 2015 l’accord de Paris sur le climat, a dénoncé jeudi 1er juin la décision de son successeur de se retirer de ce texte historique, estimant que Donald Trump « rejetait l’avenir ». « J’estime que les Etats-Unis devraient se trouver à l’avant-garde », a déclaré dans un communiqué M. Obama.

« Mais même en l’absence de leadership américain, même si cette administration se joint à une petite poignée de pays qui rejettent l’avenir, je suis certain que nos Etats, villes et entreprises seront à la hauteur et en feront encore plus pour protéger notre planète pour les générations futures. »Sur la scène internationale, cette annonce a provoqué une onde de choc pour les 194 autres pays signataires de ce texte historique. De nombreux responsables politiques ont réagi à l’annonce de Donald Trump de sortir de cet accord, qui vise à limiter la hausse de la température moyenne mondiale.

Une « grave erreur »

Berlin, Paris et Rome ont « regretté » dans une déclaration commune la sortie des Etats-Unis de l’accord de Paris sur le climat. « Nous (…) prenons connaissance avec regret de la décision des Etats-Unis » de sortir de cet accord, déclarent dans un communiqué le président français Emmanuel Macron, la chancelière allemande Angela Merkel et le président du Conseil italien Paolo Gentiloni. « Nous sommes fermement convaincus que l’accord ne peut pas être renégocié », ajoutent-ils.Dans une allocution ferme prononcée depuis l’Elysée en français, puis en anglais – une première –, Emmanuel Macron a qualifié de « faute pour l’avenir de notre planète » la décision de son homologue américain, tout en rappelant l’irréversibilité de l’accord de Paris.

Ne remettant pas en cause l’alliance avec Washington concernant la défense, la sécurité et l’économie, le président français a ouvert la porte aux Américains, invitant les scientifiques et ingénieurs des Etats-Unis à venir travailler dans l’Hexagone sur le climat. « En France, ils trouveront une seconde patrie, et des solutions concrètes », a-t-il déclaré.

Tout en rappelant travailler avec l’Allemagne et l’Italie sur « des initiatives fortes », Emmanuel Macron a détourné le slogan du président Trump : « Make our planet great again » (« Rendre sa grandeur à la planète »). « Les Etats-Unis et la France continueront à travailler ensemble mais pas sur le sujet du climat », a également prévenu le chef de l’Etat Français lors d’un échange téléphonique de cinq minutes avec Angela Merkel, a-t-on précisé de même source.

Donald Trump commet « une erreur aux conséquences dramatiques fatales », a estimé Anne Hidalgo, maire de Paris et présidente du C40, qui réunit 91 villes du monde mobilisées pour le climat. Dans un communiqué, l’édile « appelle solennellement le gouvernement des Etats-Unis à revenir sur cette décision dramatique ».

L’ancien président François Hollande regrette « une décision funeste pour les Etats-Unis ». « Le retrait américain ne suspend pas l’accord de Paris. Il doit au contraire en accélérer la mise en œuvre », a estimé dans un communiqué l’ancien chef de l’Etat, qui avait accueilli en décembre 2015 la conférence de Paris.

« Ce qui s’est produit à Paris est irréversible. La valeur de cet accord ne dépend pas du bon vouloir d’un président américain. Il s’inscrit dans le temps long, celui des générations futures. Donald Trump a renoncé à l’avenir, pas les Etats-Unis ».

L’ex-ministre française de l’environnement, Ségolène Royal, a qualifié de « très grave délit contre l’humanité » la décision de Donald Trump.

« Il ne faut pas le laisser faire, parce que s’il arrivait à ses fins, ce serait un très grave délit contre l’humanité. »

« Cette décision, ce discours, c’est une faute honteuse, et une erreur majeure. Ensuite c’est un lot de mensonges, et la seule réaction est la mobilisation mondiale, c’est ce qu’il faut faire », a pour sa part fustigé Laurent Fabius, ancien président de la COP21.

« L’accord de Paris va durer »

La première ministre britannique Theresa May a pu en parler directement avec le président américain, par téléphone, lui déclarant que l’accord de Paris sur le climat protège « la prospérité et la sécurité des générations futures, tout en assurant l’accessibilité de l’énergie pour nos citoyens et nos entreprises », a rapporté Downing Street.

Le gouvernement belge a quant à lui estimé que cette décision « irresponsable (…) portait atteinte à la parole donnée ». « La décision des Etats-Unis ne doit pas freiner notre mobilisation en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique. Nous devons redoubler d’efforts pour faire en sorte que les grandes puissances réaffirment leurs engagements », a déclaré Charles Michel, le premier ministre cité dans un communiqué.

Lire aussi :   Climat : Donald Trump annonce le retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris

La chancelière allemande, Angela Merkel, a dit « regretter » la décision américaine. La chancelière a appelé à poursuivre « la politique climatique qui préserve notre terre ». Auparavant, plusieurs de ses ministres sociaux-démocrates, dont son chef de la diplomatie, avaient estimé que la décision de M. Trump allait « nuire » au monde entier. Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a, lui aussi, qualifié de « gravement erronée » l’annonce du président américain.

Le monde « peut continuer à compter sur l’Europe » pour diriger la lutte contre le réchauffement climatique, a réagi, pour sa part, le commissaire européen à l’action pour le climat, Miguel Arias Canete, qui a aussi regretté « profondément la décision unilatérale de l’administration Trump ». « L’accord de Paris doit être respecté. c’est une question de confiance, a estimé le président du Parlement européen, Antonio Tajani. L’accord de Paris est vivant et nous le mènerons à bien, avec ou sans l’administration américaine. »

Déception générale

Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, a fait part au président américain Donald Trump de « sa déception » lors d’un entretien téléphonique. Le Brésil a aussi manifesté sa « profonde préoccupation et sa déception ». La chancellerie brésilienne s’est déclarée « inquiète de l’impact négatif d’une telle décision », tout en rappelant que « le combat contre le changement climatique est un processus irréversible ».Dans un communiqué, le Japon a qualifié de « regrettable » la décision du président américain Donald Trump. Rappelant que le changement climatique exige des « efforts concertés de l’ensemble de la communauté internationale », l’Archipel, sixième émetteur mondial, souligne l’importance « du volontarisme des nations développées ».

Malgré le choix de Donald Trump, il souhaite « rechercher les moyens de coopérer avec les Etats-Unis pour résoudre efficacement les problèmes posés par le changement climatique ». Dans le même temps, Tokyo affirme sa volonté de « travailler avec les autres membres de l’accord de Paris pour sa mise en œuvre rapide et complète », afin de « s’attaquer vigoureusement à la question essentielle du changement climatique ».

L’appel de l’ONU au secteur privé

Dans les travées onusiennes, où l’accord de Paris a été signé en grande pompe le 22 avril 2016, les diplomates assurent que cette annonce « n’est pas un choc » mais une « immense déception » partagée par le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres. Ce dernier avait lancé dès mardi une offensive diplomatique pour tenter de convaincre l’imprévisible président américain de rester membre de cet accord international.

Lors d’un discours à l’université de New York, M. Guterres avait prévenu, sans jamais nommer les Etats-Unis, que ceux qui échoueraient « à faire le pari de l’économie verte » connaîtraient « un avenir gris ».

Quelques minutes après la fin de la conférence de M. Trump annonçant le retrait des Etats-Unis, le secrétaire général enjoignait dans un communiqué les villes, les états et les entreprises américaines à continuer à œuvrer « en faveur d’une croissance économique durable et à faible émission de carbone ». Les Etats-Unis doivent « rester un leader sur les questions environnementales » a-t-il lancé dans un appel très clair au secteur privé à prendre le relais de l’administration en place à Washington sur l’action climatique.

Le discours du président Trump jugé « isolationniste et inutilement haineux contre le reste du monde » par un diplomate européen, a surtout été perçu comme une remise en cause du système multilatéral. « C’est une décision arrogante » estime un ambassadeur, qui ne souhaite pas être cité.

François Delattre, le représentant français à l’ONU, y voit un basculement possible des jeux de puissance. « Sur le plan géopolitique, la décision américaine peut être lue comme un facteur d’érosion du leadership moral et politique des Etats Unis : l’Amérique est perçue comme étant du mauvais côté de l’histoire passant du statut de garant en dernier recours de l’ordre mondial à celui de menace pour l’équilibre de notre planète. »

L’inquiétude des pays menacés par la montée des eaux

Mais les critiques les plus virulents restent les représentants des petites îles, gravement menacées par la montée des eaux. L’ambassadeur des Seychelles à l’ONU, Ronny Jumeau, dont le pays connaît déjà une érosion catastrophique des côtes et des épisodes de sécheresse inhabituels, estime « vital » que les autres pays membres de l’accord de Paris « ne se saisissent pas de cette opportunité pour ralentir leur contribution ou sortir de l’accord ».

Donald Trump a en effet semblé annoncer la fin de la participation américaine au fond vert, l’instrument financier crée par l’accord de Paris pour aider les pays les plus pauvres et les plus menacés à lutter contre le changement climatique. Barack Obama avait fait une contribution à ce fond d’un milliard de dollars à la fin de son mandat.