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États-Unis : la jeunesse se rassemble en masse contre les armes

Écrit par sur mars 25, 2018

D'habitude, ce sont les discours et les slogans qu'on se rappelle dans une manifestation. Mais, lors de la marche organisée hier à Washington à la suite de la fusillade ayant eu lieu au Marjory-Stoneman-Douglas, en Floride, c'est le silence qui restera le moment le plus poignant. Un long silence. Lorsqu'Emma Gonzales, l'une survivantes de la fusillade de Parkland, prend la parole à la tribune, elle explique qu'au cours des « six minutes et vingt secondes » qu'a duré la fusillade, « 17 de (leurs) amis » ont perdu la vie, 15 ont été blessés et « absolument tout le monde dans la communauté » a été affecté. « Personne ne peut comprendre les répercussions dévastatrices », dit-elle, avant de lister ce que les victimes ne pourront plus jamais faire : se plaindre de leur leçon de piano, jouer au basket, traîner avec leurs copains…

Puis elle s'arrête de parler brutalement et reste debout immobile, les larmes coulant lentement le long de ses joues. Surprise, l'énorme foule se tait soudain, attendant sans comprendre, puis, à mesure que le silence se prolonge, on s'agite dans la foule. Certains crient « on t'aime, Emma », d'autres entonnent « plus jamais, plus jamais ». Mais Emma reste muette, les yeux fixés au loin, jusqu'à ce que résonne le bip d'une alarme. « Il s'est écoulé six minutes et vingt secondes », reprend-elle. « Battez-vous pour votre vie avant que quelqu'un ne le fasse pour vous », conclut la rescapée en quittant la scène.

Qu'est-ce qui est le plus précieux, votre gamin ou vos flingues ?

 

Ce samedi, dans une vingtaine de villes, de Chicago à Oakland, en passant par Atlanta, plus d'un million de personnes ont marché pour exiger des mesures limitant les armes. Mais c'est à Washington que s'est tenue la plus grosse des « March For Our Lives » (« Marchons pour nos vies ») organisées par les élèves de Parkland. Des centaines de milliers de personnes – les organisateurs évoquaient le chiffre de 800 000 – ont défilé le long de la célèbre Pennsylvanie Avenue, scandant des « ça suffit » et agitant toutes sortes de pancartes : « Les balles ne sont pas une fourniture scolaire », « Les lois promulguées au XVIIIe siècle ne peuvent pas réglementer les armes du XXIe siècle », « Qu'est-ce qui est le plus précieux, votre gamin ou vos flingues ? » et le jeu de mots qui fait mouche en anglais « Arms are for hugging » (« arm » en anglais signifie à la fois arme et bras, il faut donc traduire « les bras sont faits pour enlacer »).

Nous sommes le changement »

Avec le Capitole en fond de décor, des chanteurs comme Jennifer Hudson, Miley Cyrus, Ariana Grande, Paul McCartney – qui a défilé en expliquant avoir « perdu un ami » il y a quelques années (il s'agissait de John Lennon, abattu à New York en 1980) – et une vingtaine de collégiens et de lycéens de Parkland mais aussi d'autres écoles victimes de la violence des armes à feu ont pris la parole. « Bienvenue à la révolution », a clamé Cameron Kasky, l'un des élèves de Parkland. « Les gens me demandent : Pensez-vous que tout cela va entraîner un changement ? Regardez autour de vous. Nous sommes le changement », a-t-il dit, avant de promettre de « créer un monde meilleur pour les générations futures ».Dans la foule, il y avait des parents et des grands-parents comme Peter, un employé de la Nasa qui brandissait une pancarte avec un slogan en vers de mirliton : « Bougez votre derrière, résistez à LaPierre (le patron de la NRA, NDLR). » « Je suis là pour demander des limites raisonnables au port d'arme et l'interdiction des ventes de fusils d'assaut et je suis très fier de ces ados qui ont organisé la marche », nous explique-t-il. Il y avait aussi bien sûr beaucoup de jeunes très remontés. « Les élus ne font pas leur boulot. Je ne devrais pas avoir peur chaque fois que j'entends une sirène dans mon lycée, je veux me sentir en sécurité en classe, je ne veux pas avoir à enterrer mes copains… On peut changer les choses », affirme Katelyn, 14 ans, venue de Californie. « On n'a cessé de nous dire que la voix des ados ne comptait pas, que les gens oubliaient vite après chaque massacre. Mais il y a plein de monde aujourd'hui et on peut faire la différence », renchérit Anna, une lycéenne de Washington. Pas loin, la directrice d'Excel Academy, un lycée public de Baltimore, avait amené 17 élèves, soit le nombre de victimes de Parkland.Et la réponse n'est pas d'armer les profs – comme l'a suggéré Donald Trump –, s'insurge Marisol Estevez, une institutrice de maternelle. « Les armes n'ont pas leur place dans une classe. Je dois déjà gérer les exercices d'alerte qu'on a maintenant régulièrement pour se préparer à l'intrusion d'un tireur. Chaque fois, je dois m'enfermer dans un placard avec ces enfants de quatre ans en leur disant de ne pas faire de bruit et ensuite je dois passer beaucoup de temps à les calmer car ils sont terrorisés. Ce n'est pas à cela que devrait ressembler l'enseignement. »

Le silence de Trump

Non loin d'elle, un groupe d'ex-Marines appelait aussi à une réforme du port d'arme. « Moi, j'étais volontaire pour aller au combat et me faire tirer dessus. Mais ces mômes n'étaient pas volontaires », a résumé sobrement Daniel Riley qui a perdu ses deux jambes en Afghanistan et marche désormais sur deux prothèses. Dan Anderson, l'un de ses camarades, ajoute : « Je ne comprends pas pourquoi les civils ont accès à des armes militaires. Nous, nous recevons une formation sur la manière d'utiliser un fusil d'assaut, de le manipuler, de l'entreposer, mais les civils n'ont pas le même entraînement. »

Avant ces différentes marches, la NRA, le lobby des armes, avait publié sur Facebook ce message : « Les manifestations d'aujourd'hui (de samedi, NDLR) ne sont pas spontanées. Les milliardaires qui détestent les armes et les élites de Hollywood manipulent et exploitent les enfants dans le cadre de leur plan pour détruire le second amendement et nous dépouiller de notre droit de nous défendre, nous et nos proches. »