Quand l’album de Black Yaya est arrivé au courrier, on a cru recevoir l’album solo de David-Ivar d’Herman Dune. On avait tort.
“C’est compliqué pour moi de penser en termes de ‘disque solo’ car le concept de groupe a toujours été un peu vague à mes yeux. J’ai toujours fondé ma musique sur mes chansons, c’était déjà assez personnel.”
Black Yaya, donc, est finalement une nouvelle métamorphose pour le multiple David-Ivar, surnommé Yaya depuis un bail parce qu’enfant il aimait beaucoup la chanson Ya Ya de Lee Dorsey.
Le disque qu’il présente aujourd’hui a été, déjà, longuement promené sur les routes américaines. Dans une tournée organisée avec peu de moyens, David-Ivar a retrouvé la joie de se produire, mais aussi d’absorber le monde autour de lui.
“Ça fait un an que je me produis aux Etats-Unis sous ce nom. Un des plaisirs de ce projet, c’est de ne pas avoir à jouer d’anciens morceaux. Chaque soir, tout est nouveau. Le fait de tourner seul avec une guitare me manquait. En groupe, tu es dans un état presque adolescent : tu te mets en bande pour te protéger de l’extérieur, ça s’instaure naturellement. Seul, tu as un échange plus profond avec la ville que tu découvres.”
Quand il est en tournée, David-Ivar partage son temps entre le quartier de la salle de concerts, où il joue, et celui de la piscine, où il va nager. Ça tombe bien, il y a toujours eu quelque chose d’aquatique, d’amniotique presque, dans ses compositions. Si l’expression n’était pas répandue, on dirait même de la musique d’Herman Dune qu’elle a souvent été notre comfort-music. Rédigeant un chapitre folk-rock singulier dans l’histoire de France, ces chansons bavardes et touchantes à la fois ont toujours fait du grand avec du petit.
Longtemps étiquetée anti-folk, la musique de David-Ivar se détache aujourd’hui de la sobriété des débuts. Avec Black Yaya, le musicien opte pour une production plus riche.
“Mon côté DIY est venu par nécessité. On ne m’a pas offert autre chose quand j’ai commencé. Je suis tombé à une époque où l’on pouvait enregistrer soi-même alors je l’ai fait. Mais l’esthétique lo-fi n’a jamais été un idéal esthétique, même si j’aime beaucoup le résultat. C’est la même chose pour Daniel Johnston : je sais que son groupe préféré, c’est les Beatles.”
Ce disque de Black Yaya voit d’ailleurs son protagoniste faire de belles pirouettes entres les genres et les époques. Flying a Rocket, ainsi, aurait pu être un morceau de Lennon à la fin de sa vie ; Glad Tidings flirte avec le r’n’b ; Lo & Behold a la langueur d’un classique seventies… Under Your Skin ou Watchman, enfin, confirment le don du musicien pour tailler des petits tubes instantanés, l’éloignant encore davantage des clichés bucoliques du folk. “J’aime produire, j’aime les clubs. Je suis attaché aux villes. J’ai étudié l’architecture, et l’urbanisme était ce que je préférais. Ma musique a toujours été assez urbaine.”
Ecrit et enregistré sous le soleil invariable de Los Angeles, l’album de Black Yaya a été une opération pleine pour David-Ivar : il y a tout joué lui-même, et pris la casquette du producteur. Le résultat, touchant et atypique, lui ressemble.
Source : http://www.lesinrocks.com