Bientôt un hommage national pour Michel Rocard
Écrit par Jonathan PIRIOU sur juillet 3, 2016
Plusieurs figures historiques du PS ont rendu hommage à l'ancien Premier ministre décédé samedi. L'exécutif salue son engagement et ses idées. Parler-vrai », « visionnaire », « homme de gauche »… les mots d'hommage pleuvent depuis le décès de Michel Rocard hier, samedi 2 juillet, à la Pitié-Salepêtrière. L'ancien Premier ministre de François Mitterrand a été salué par l'ensemble de la classe politique, mais la gauche particulièrement pleure un de ses anciens leaders. Cérémonie au temple protestant, hommage national aux Invalides et hommage au siège du Parti socialiste, l'ex-Premier ministre, décédé à 85 ans, avait laissé un testament « très précis » sur le triple hommage qu'il souhaitait à sa mort, a déclaré le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis.
Inhumé en Corse
L'ancien Premier ministre socialiste Michel Rocard, décédé samedi, sera incinéré dans la semaine à Paris et ses cendres seront ultérieurement inhumées à Monticello, en Corse, d'où est originaire sa dernière épouse, Sylvie, a annoncé dimanche à l'AFP son fils Francis. Sur l'île, la mort de l'ancien chef du gouvernement a suscité de l'émotion, la classe politique saluant la mémoire d'un homme d'État ayant eu des relations privilégiées avec la Corse. « Michel Rocard est mort. Nous le pleurons. Il fut un humaniste convaincu, un homme d'État, et un ami sincère de la Corse et de son peuple », a ainsi écrit le président du conseil exécutif de Corse et nationaliste modéré Gilles Simeoni sur son compte Twitter. « Michel Rocard : un homme courageux, visionnaire et qui aimait la Corse. Pensées amicales à Sylvie, son épouse, et à tous les siens », a quant à lui réagi le président de l'Assemblée de Corse, l'indépendantiste Jean-Guy Talamoni.
Une cérémonie au temple protestant va être organisée dans les jours qui viennent, suivie d'un hommage national à Michel Rocard aux Invalides, à Paris, présidé par François Hollande, puis d'un hommage au siège du PS, autour du 11 juillet. Une minute de silence est par ailleurs prévue lundi soir à la mairie de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), dont Michel Rocard fut longtemps maire. Ce dimanche matin, François Hollande s'est rendu à la Pitié-Salpêtrière pour rendre un hommage personnel à Michel Rocard et saluer sa famille, a indiqué l'entourage du chef de l'État. Le Premier ministre Manuel Valls devait faire de même à la mi-journée pour saluer celui qu'il considère comme son « père en politique », auprès duquel il travailla à Matignon.
La planète pour horizon
Atteint d'un cancer, Michel Rocard « subissait des traitements lourds, il préparait avec beaucoup de lucidité, de courage et sérénité ses derniers mois », a raconté François Hollande au JDD. Le président de la République a dit l'avoir vu il y a un mois pour la dernière fois, « fatigué mais parfaitement conscient », à la remise de la Légion d'honneur au peintre Pierre Soulages, « son ami ». « Je l'avais vu il y a quelques jours et il pensait tenir sa réunion sur les pôles, dans quelques jours au Quai d'Orsay », a affirmé le ministre de l'Économie, Emmanuel Macron, sur Europe 1-Le Monde-i>Télé.
Toujours « en mouvement, en perpétuelle réflexion », comme sur la lutte contre le réchauffement climatique, « son horizon, c'était la planète », a souligné François Hollande. L'artisan du RMI et de la CSG a marqué l'histoire en jouant un rôle-clé dans les accords de Matignon – un des plus beaux souvenirs de sa vie politique. « La Nouvelle-Calédonie pleure celui par qui elle a pu renaître, en 1988, avec Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, après une décennie de guerre civile », a souligné le centriste Philippe Gomes, à l'unisson des hommages sur le « Caillou ».
Depuis son décès, le théoricien de la « deuxième gauche », ex-Premier ministre socialiste à l'ambition présidentielle toujours contrariée et homme d'« utopies concrètes », suscite un élan convergeant dans un pays qui reste en précampagne présidentielle. « La vérité française, c'est que l'on ne sait plus ce qu'est la droite et la gauche », jugeait Michel Rocard en juin.
Un héritage convoité
À droite, l'ancien président Jacques Chirac a rendu hommage à son « ami de jeunesse », qu'il connaissait depuis le début des années 1950, et à « un homme d'État » mêlant, « de manière rare, le goût des concepts et la capacité d'action », dans une déclaration. À gauche, un Jacques Delors ou un Lionel Jospin ont insisté à leur tour dimanche sur l'apport de Michel Rocard. Un « rôle essentiel » pour renouveler son camp, a retenu l'ancien président de la Commission européenne, regrettant qu'il n'ait pas été président de la République. Il y avait « des divergences très nettes entre François Mitterrand et Michel Rocard », mais il fallait « concilier les deux pour permettre au PS de revenir au pouvoir », a glissé le père de Martine Aubry. L'ancien Premier ministre et ancien numéro un du PS a, lui, évoqué « un social démocrate épris de dialogue social », un « réaliste, mais pas un cynique, un modernisateur en économie (…), pas un néo-libéral ».
Dans la jeune génération, tant Manuel Valls qu'Emmanuel Macron, pourtant en désaccords réguliers, ont fait passer des messages codés sur l'héritage. « Si Michel Rocard à un moment – mais on ne refait pas l'histoire avec des si – avait été président de la République, peut-être une grande partie des débats qui secouent la gauche seraient derrière nous », a lâché dimanche l'actuel locataire de Matignon. Quant au fondateur du mouvement En marche !, il a considéré que « bien souvent la France a été injuste avec lui, elle a été injuste parce qu'elle n'a pas reconnu ses idées, l'originalité de celles-ci, elle a parfois été injuste au sein même de sa propre famille ».
Adepte du « parler-vrai », Michel Rocard avait regretté dans sa dernière interview qu'Emmanuel Macron et Manuel Valls n'aient « pas eu la chance de connaître le socialisme des origines » et soient « loin de l'histoire ».