A Milan, la fabrique à jeux vidéo de motos qui résiste à toutes les tempêtes
Écrit par Jonathan PIRIOU sur juin 2, 2017
MXGP », « MotoGP » ou encore « Valentino Rossi : The Game »… la société italienne Milestone s’est imposée en vingt ans comme le leader mondial des simulations de deux roues.C’est peut-être une petite trace de pneu pour vous, mais c’est un nouveau tour de piste inespéré pour eux. MXGP3, jeu officiel du championnat du monde de motocross, est disponible depuis mardi 30 mai sur PC, PlayStation 4 et Xbox One. Le 15 juin, ce sera au tour de la simulation MotoGP 17, cette fois adaptée du championnat du monde de moto. Sortis à quinze jours d’écart, ces deux jeux vidéo n’ont rien de concurrent : ils ont été conçus par la même firme, l’entreprise milanaise Milestone. Spécialiste mondiale des courses virtuelles de deux-roues, elle est une miraculée d’un marché du jeu de course qui a connu une violente sortie de route au début des années 2000.Burnout, la série déjantée dans laquelle le joueur marquait des points en frôlant le carambolage ? Abandonnée depuis 2011. Need for Speed, la série automobile annuelle d’Electronic Arts ? En chute libre depuis des années, elle a été interrompue pour la première fois en 2013, et le studio canadien Black Box, qui a produit l’essentiel de ses épisodes, a mis la clé sous la porte. Même la saga phare de Sony, Gran Turismo, a connu des ventes décevantes en 2013 – 5 millions d’unités pour le sixième épisode, soit deux fois moins que son prédécesseur.
A l’inverse, et en dépit de moyens bien moindres, Milestone a non seulement évité la sortie de route, mais est même en pleine phase de prise de vitesse, se félicite Luisa Bixio, sa vice-présidente depuis 2012 :
« Depuis quatre ans que nous publions “MotoGP”, les chiffres sont en hausse sensible chaque année, ce qui n’est pas si évident. Le premier “MotoGP” s’est vendu autour de 400 000 unités, maintenant nous sommes plus proches de 700 000 ou 800 000 par épisode. »
Ride, sa dernière franchise en date, a même dépassé le million, et une suite vient d’être annoncée. En quatre ans, l’entreprise est passée de 7 millions à 28 millions d’euros de chiffre d’affaires.
46 jeux de course en vingt-trois ans
La moto, c’est précisément ce qui a sauvé l’entreprise quand le marché du jeu de course, essentiellement composé de simulations de rallyes, s’est effondré. « Mon sentiment est que Milestone est le meilleur studio pour ce qui relève des motos, où il y a peu de concurrence directe », avance Luisa Bixio. En 2016, outre MXGP 2 et Moto GP 16, elle avait également accouché de Ride, dédié aux plus prestigieuses motos routières, de Ducati 90th Anniversary, consacré à la célèbre marque italienne, et de Valentino Rossi : The Game, avec le nonuple champion du monde de MotoGP en guest star. Pas moins de quatre titres en un an, tous centrés autour d’une passion : les deux-roues, suite logique d’une histoire entièrement vouée au sport automobile.
L’entreprise, qui date de 1994 – alors baptisée Graffiti – compte plus d’une quarantaine de jeux à son actif. Tous des jeux de course, à l’exception du tout premier. « Milestone a été fondé par Antonio Farina, qui était un énorme fan de voitures, et le jeu de course était le genre le plus à la mode à l’époque », explique Luisa Bixio. En pleine explosion du genre du jeu de course en 3D au milieu des années 1990 – la période de Sega Rally, Ridge Racer et Daytona’USA, l’entreprise milanaise réussit à se faire une place avec Screamer, son propre simulateur sur PC, et convainc plusieurs grands noms de l’édition, comme Electronic Arts, Virgin ou Capcom de les éditer.Mais c’est en 2001 que Milestone connaît son succès le plus stratégique, avec SBK, son premier jeu de deux-roues. « On s’est constitué une communauté, car c’était la première simulation de superbike. Depuis, on s’est spécialisé », relate Michele Caletti, lead designer. Quant à s’essayer à d’autres genres, « bien sûr la question revient », admet Luisa Bixio. Mais Milestone a le bitume dans la peau, explique-t-elle tout sourire.
Plus grande entreprise de jeu vidéo d’Italie
Depuis, le studio milanais s’est mué en une impressionnante fabrique à l’organisation huilée et à la production élevée. Au sein de ses locaux spacieux, lumineux et modernes, 170 personnes sont aujourd’hui réparties en grappes par projet et par type de métier – programmeur, animateur ou concepteur, mais aussi responsables des licences, de la communication, ou encore du contact avec les joueurs. Elle est aujourd’hui la plus grande entreprise de jeu vidéo d’Italie, et un cas à part au sein d’une industrie sous-développée dans le pays. « Ici, il n’y a pas beaucoup de culture de la formation en jeu vidéo. Pour nous, si vous êtes passionné de jeu vidéo et de sports mécaniques, et prêts à apprendre, nous sommes ouverts », assure Michele Caletti, responsable de MXGP 3.