A Escource, petit village des Landes, le pari des panneaux solaires a permis de réduire les factures et de geler les impôts
Écrit par Jonathan PIRIOU sur avril 11, 2025
Il y a quinze ans, la mairie s’est lancée dans le développement des panneaux solaires dans toute la commune. Un choix payant face à la forte augmentation des tarifs de l’électricité ces dernières années.Escource, 816 habitants, pour plus de 900 m2 de panneaux solaires. Dans ce petit village des Landes, le photovoltaïque est partout. On en trouve sur la salle des fêtes, les toilettes publiques, l’école, le stade de foot ou l’ombrière du parking, et même sur une aile de l’église. Un développement voulu par l’ancien maire, Patrick Sabin (sans étiquette), en poste entre 2008 et 2024. “Il y a un intérêt écologique, bien sûr, qui était notre fil rouge, expose celui qui est aujourd’hui premier adjoint. Mais il y a aussi un intérêt économique.”Car la commune ne paye plus aucune facture pour son éclairage public. Une partie des réverbères sont directement équipés de panneaux solaires, l’autre est reliée à des batteries alimentées par ceux de la salle des fêtes. Sur une année, le photovoltaïque couvre 61% de la consommation électrique des bâtiments communaux. Une aubaine avec l’explosion des prix de l’énergie provoqués par la guerre en Ukraine. En 2008, Escource payait 58 000 euros pour son électricité et son fioul. Et l’an dernier ? La commune a limité ses factures à… 37 000 euros. “Si on n’avait rien fait entre les nouveaux bâtiments et le prix de l’électricité qui a explosé, aujourd’hui, on aurait une facture qui serait multipliée par trois”, calcule Patrick Sabin.
“On m’a pris pour un farfelu”
A l’origine de ces économies, une catastrophe en 2009. Cette année-là, la tempête Klaus ravage les Landes. A Escource, comme ailleurs, les pins maritimes sont à terre. Une perte de revenus pour la commune, propriétaire de 600 hectares de forêts. Le maire voit défiler des promoteurs qui lui proposent de remplacer ses arbres par des champs de panneaux solaires ou des éoliennes. Mais Patrick Sabin se méfie : des fonds de pension sont au capital de ces sociétés, l’une d’elles a son siège aux îles Caïmans. “Ça a vraiment été le déclic, se souvient-il. On s’est dit : ‘Mais qu’est-ce qu’on fait ? Est-ce qu’on leur donne toute notre production, tout notre vent, tout notre soleil, et puis l’argent va partir ailleurs ?'”
Il décide alors de se lancer lui-même dans le développement des énergies renouvelables. D’abord, il a fallu isoler les bâtiments publics, puis déployer des panneaux photovoltaïques et des batteries. Dans la chaudière communale, qui permet de chauffer presque tous les locaux municipaux, le bois remplace le fioul. Prudent, l’édile ne communique pas particulièrement sur son projet les premières années. “Il y a des gens qui m’ont pris pour un farfelu, pour un écolo, tout ce que vous voulez. Aujourd’hui, on a apporté la preuve par A+B que le chemin qu’on avait pris était le bon”, savoure-t-il.
“Mes impôts n’ont pas augmenté depuis 12 ans et demi”
Accoudé au bar du village, Victor Garcia, 76 ans, confesse avoir d’abord été un peu sceptique. “Il fallait du temps pour rentabiliser l’affaire, argumente cet habitant du village. Maintenant, je trouve que c’est vraiment très bien.” Les panneaux solaires sont d’autant plus acceptés qu’ils ont permis de ne pas augmenter les impôts locaux, malgré l’envolée des prix de l’énergie. “Mes impôts n’ont pas augmenté depuis 12 ans et demi. Pour nous qui sommes à la retraite, c’est appréciable”, témoigne Aline Zengarli, 75 ans.
Les trois commerces du bourg (un restaurant, le bar-tabac-épicerie et le coiffeur) y trouvent aussi leur compte. Depuis un an, la mairie leur revend son surplus d’électricité, à 10 centimes le KWh, contre 25 pour le tarif EDF. “Nous avons fait une économie de 150 euros par rapport à l’année dernière sur le mois de février, qui n’était pas très ensoleillé”, calcule Valérie Geffroy, propriétaire avec son mari du restaurant Le Plaisir des Mets. Ils ont économisé au total un peu plus de 1 200 euros l’année dernière. “Ça nous a permis de passer au mieux la crise”, estime Mickäel Geffroy.
Ils ne seront bientôt plus les seuls à en profiter. En 2025, Escource va permettre à ses habitants de bénéficier de cette électricité à prix cassé, via une coopérative. La commune compte aussi s’équiper de véhicules de service à charge bidirectionnelle, des sortes de “batteries roulantes” capables de réinjecter l’électricité dans le réseau lorsqu’elles ne roulent pas. Avec ces nouvelles capacités de stockage, la commune fera un pas de plus vers l’autonomie électrique.
Depuis le XIXe siècle, la température moyenne de la Terre s’est réchauffée de 1,1°C. Les scientifiques ont établi avec certitude que cette hausse est due aux activités humaines, consommatrices d’énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz). Ce réchauffement, inédit par sa rapidité, menace l’avenir de nos sociétés et la biodiversité. Mais des solutions – énergies renouvelables, sobriété, diminution de la consommation de viande – existent. Découvrez nos réponses à vos questions sur la crise climatique.