Bracelet électronique, aménagement de peines, droit de vote pour les détenus : Macron réforme la prison
Écrit par Jonathan PIRIOU sur mars 6, 2018
Le président a annoncé ce mardi une « refondation pénale » afin de rendre les peines de prison plus efficaces et de lutter contre la surpopulation carcérale. Parmi les mesures principales : la généralisation du bracelet électronique, la fin des aménagements de peines au-delà d’un an et le droit de vote accordé aux détenus.
En visite à l’École nationale de l’administration pénitentiaire à Agen (Lot-et-Garonne), Emmanuel Macron a présenté ce mardi une refondation des peines de prison. Aux côtés de la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, le président a présenté une réforme qui abandonne la préférence carcérale pour d’autres options comme le bracelet électronique ou le travail d’intérêt général.
« Nous devons nous demander ce qu’est une peine », a questionné Emmanuel Macron avant de présenter sa réforme du système des peines. « Il y a les laxistes qui voudraient que personne ne soit puni et de l’autre, les vrais durs, qui sont pour emprisonner les gens. Je ne crois dans aucune de ces options, car c’est une vision manichéenne ».Nous voyons aujourd’hui que les peines telles qu’elles sont appliquées ne permettent pas de jouer leur fonction [de protection de la société] elles ont aussi un rôle d’éducation », a expliqué le président devant les élèves de l’École de l’administration pénitentiaire d’Agen.
« La peine n’est pas là pour répondre à une émotion de la société. Il faut penser la peine en fonction de chacun ».
L’effectivité des peines et la dignité
Emmanuel Macron a posé les deux principes qui, selon lui, doivent guider sa réforme du système carcéral. Tout d’abord l’effectivité des peines : « Une peine telle qu’elle est prononcée à vocation à être exécutée, avec des délais réalistes ».
Ensuite, la dignité : « un détenu est un individu simplement privé de sa liberté, mais pas de ses autres droits ».Je souhaite [l’instauration] du dossier unique de personnalité », a annoncé le président. Un document qui existe déjà pour les mineurs. Il permet de déterminer avec précisions les éléments de personnalité des prévenus avant leur jugement. « Cela permettra une meilleure décision pour éviter les peines de prison inutiles », a noté le président. « C’est le cœur même de l’individualisation de la peine », a-t-il ajouté.
Favoriser le bracelet électronique pour les courtes peines
Le Président a présenté une refonte du système carcéral qui met « un terme à l’automatisation des peines carcérales ». Aussi les « peines de moins d’un mois seront proscrites », a déclaré le chef de l’État. Il ne sera plus possible pour les juges d’incarcérer un condamné à des peines de moins d’un mois. « Ce sont les petites peines qui sont les moins efficaces », s’est justifié le Président.Il a aussi annoncé une plus grande généralisation du port du bracelet électronique pour les « petites peines ». Les peines de 1 à 6 mois pourront ainsi avec cette réforme s’exercer hors des prisons. « Elles pourront être exécutées sous surveillance électronique ».
Afin d’éviter que les détenus effectuent leur peine avant leur jugement. Le président a aussi annoncé la création d’un « mandat de dépôt différé ». Avec ce mandat de dépôt différé, les juges pourront ordonner l’incarcération d’un condamné à l’issue d’un certain délai.
Parallèlement le Président a aussi annoncé la forfaitisation de plusieurs délits, comme l’usage de stupéfiants. « Il y aura d’autres peines comme l’amende », a développé Emmanuel Macron.
Le renforcement du travail d’intérêt général
Le président a aussi exprimé sa volonté d’étendre le travail d’intérêt général. « Pour qu’il soit une peine significative, contraignante, mais qui réintègre le détenu dans la société ». Aujourd’hui le travail d’intérêt général ne représente que 6 % des condamnations.
Emmanuel Macron a aussi souhaité le renforcement du travail dans les prisons. « Reconnaître un droit du travail adapté est une mesure indispensable, qui permet de les réinsérer dans la société »,
Le président a invité les entreprises privées à l’Élysée pour discuter des partenariats possibles avec les maisons d’arrêts.
La fin des aménagements de peines au-delà d’un an
Pour toutes les peines de plus de six mois « il n’y aura plus d’aménagement automatique », a déclaré le Chef de l’État. « Au-delà d’une peine de plus d’un an, il n’y aura plus d’aménagement de la peine ».
Aujourd’hui les aménagements de peines peuvent être discutés avec le juge d’application des peines quelle que soit la durée de la condamnation.
Emmanuel Macron a annoncé en parallèle la création de 1 500 postes de conseillers d’insertion et probation, dans le cadre d’un plan global sur les prisons.
« La filière insertion et probation bénéficiera de la création de 1 500 postes » de ces conseillers chargés de suivre les condamnés après leur sortie de prison, a déclaré le président.
Actuellement le nombre de ces conseillers s’élève à 4 000 pour 250 000 personnes suivies en détention ou en milieu ouvert.
Rénover les établissements pénitentiaires
« Nous avons un problème immobilier », a ajouté le président devant les élèves de l’École de l’administration pénitentiaire d’Agen.
« Il est indispensable de procéder à la rénovation de plusieurs établissements », a expliqué Emmanuel Macron.
Avec un taux d’occupation de 200 % dans les prisons en région parisienne et de 120 % au niveau national, la France figure parmi les pires élèves d’Europe en matière de surpopulation carcérale. Au 1er janvier 2018, 68 974 détenus s’entassaient dans des cellules prévues pour accueillir 59 765 personnes maximum.
Le droit de vote accordé aux détenus
« On a essayé de m’expliquer pourquoi les détenus n’avaient pas le droit de voter, je ne l’ai toujours pas compris », a confié le président qui a annoncé sa volonté d’accorder le droit de vote pour les prisonniers.