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Pourquoi Mélenchon peut miser sur une percée plus solide qu’en 2012

Écrit par sur avril 12, 2017

La poussée de Jean-Luc Mélenchon dans les sondages n'est pas inédite : en 2012 un phénomène similaire s'était soldé par une déception cuisante. Mais la conjoncture actuelle est bien différente et sa progression plus solide.

«Une poussée spectaculaire de Mélenchon dans les sondages…» C'est le commentaire délivré Il y a très exactement 5 ans, le 12 avril 2012 de l'institut de sondage BVA au sujet de l'une de ses études d'opinion. Celui qui portait alors les couleurs du Front de gauche, et non de la France Insoumise, venait alors de dépasser Nicolas Sarkozy, et de venir talonner François Hollande, dans une enquête d'opinion mesurant «la présidentiabilité» des candidats. Le même jour, un autre sondage CSA le donne le candidat culminant à 17% dans les intentions de vote: du jamais vu depuis l'emblématique Georges Marchais. Dès lors, les espoirs les plus fous apparaissent: celui qui se revendique de «la vraie gauche» s'imagine en passe de réaliser le pari de sa stratégie «front contre front» en damant le pion à Marine Le Pen.

Mais c'était sans compter la force du vote utile à gauche, qui a bénéficié à l'instant fatidique du vote massivement au candidat du PS François Hollande. Par ailleurs, le discours du Bourget, prononcé en janvier 2014, a redonné une légitimité à ce dernier au sein d'une partie d'un électorat de gauche. La poussée se soldera par une lourde déception: Jean-Luc Mélenchon, qui partait de très bas (il était donné à 5% en décembre 2011) n'atteindra que la quatrième place avec 11%. Marine Le Pen le devancera largement en franchissant la barre des 18%, le plus haut score atteint jusqu'alors par son parti. Et François Hollande, parvenu à l'Élysée, a su convaincre la base socialiste de redonner sa chance à la gauche modérée. Mélenchon n'est pas parvenu à se placer en centre de gravité d'une gauche «véritable», qu'il voulait opposer à la tendance sociale libérale qu'il décelait chez ses anciens camarades du PS.

Cinq ans plus tard, les astres semblent s'aligner dans une disposition similaire. «Ça s'entend, ça se sent… la victoire est à la portée de nos efforts», a d'ailleurs estimé Jean-Luc Mélenchon à Marseille 10 avril dernier. À deux semaines du premier tour, Jean-Luc Mélenchon est de nouveau donné troisième homme du scrutin, avec un potentiel de 17-18%. C'est cette fois le candidat de la droite François Fillon qui se trouve relégué hors du trio de tête par la poussée du tribun de la France insoumise. Mais au-delà de ces similitudes, un certain nombre de différences peuvent laisser penser à une progression plus solide du candidat Mélenchon qu'en 2012.

Une conjoncture politique bien différente de celle de 2012

Tout d'abord, le quinquennat Hollande a produit une profonde déception au regard des fortes attentes à gauche suscitée par le Bourget. Les crises et mouvements sociaux comme Nuit Debout ou le conflit contre la loi Travail ont créé une caisse de résonance pour Mélenchon. Un positionnement que l'ancien ministre de François Hollande, Benoît Hamon, étiqueté PS, a bien du mal à lui disputer. A fortiori, puisque l'évolution nettement écologiste du discours mélenchoniste a en partie désamorcé l'impact du ralliement de Yannick Jadot. Par ailleurs, le candidat de La France Insoumise est parvenu à s'adresser à un public large, en assumant de ne plus chercher à rassembler la seule gauche. En modifiant les symboles, les couleurs et les chants de la campagne, en développant un positionnement nouveau sur la sécurité, sur l'immigration et réaffirmant une certaine intransigeance sur la laïcité, Jean-Luc Mélenchon séduit au-delà de la sphère classique, au point même que certains électeurs de Nicolas Dupont-Aignan ou de Marine Le Pen se disent prêts à le soutenir, si leur favori était éliminé.

Enfin, contrairement à 2012, Mélenchon compte bien tirer les leçons de ses échecs passés. Le candidat et son entourage en sont persuadés, son ode à l'immigration heureuse, prononcée à Marseille à 15 jours du scrutin d'il y a cinq ans lui ont valu un sévère décrochage. À l'approche de la fin de la campagne, le candidat avait préféré marquer un retrait, par fatigue et par souci de ne pas éroder sa popularité. Il mettra cette année les bouchées doubles jusqu'au bout, avec notamment un nouveau meeting holographique, transmis dans six salles à travers la France. Autre signe de la vigilance observée en cette fin de course, la volonté de ne pas risquer un débat le 20 avril, à la veille du premier tour. L'ancien sénateur a été le premier à annoncer ses doutes. L'une des raisons assumées dans l'entourage du fondateur du Parti de gauche est en effet l'inquiétude de voir surgir une boule puante de dernière minute, à laquelle il ne puisse pas répondre.