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L’élection de Donald Trump, le premier jour d’un monde nouveau C’est le premier jour

Écrit par sur novembre 9, 2016

C’est le premier jour d’un monde nouveau. L’inconnu nous fait peur, et nous avons raison d’avoir peur.Stupeur et tremblement: c'est le premier jour d'un monde nouveau. L'inconnu nous fait peur, et nous avons raison d'avoir peur. L'élection de Donald Trump est beaucoup plus qu'un scrutin ordinaire. C'est un monde qui bascule dans ses repères.

Quelques impressions, en vrac :

On n'a rien vu venir : "on" c'est la classe politique, les médias, les experts, tous ceux que Donald Trump voue aux gémonies. On voyait bien la colère pointer dans tous les meetings, mais on se rassurait en se disant : les Américains ne peuvent pas choisir un homme aussi imprévisible, avec un programme – ou une absence de programme – qui se résume à "sortez-les tous !"

On n'a surtout pas mesuré la rage, la frustration d'une Amérique à l'écart de tout : de son avenir, de celui de ses enfants, de la mondialisation, de la révolution technologique, numérique, démographique. Cette Amérique où se sont creusées les inégalités de façon terrifiante depuis une dizaine d'années. Non seulement la classe moyenne blanche a dit sa peur et son angoisse de l'avenir, mais les ouvriers, autrefois démocrates, dans des Etats comme l'Ohio, le Michigan, ont voté pour un milliardaire qui se disait le porte parole des gens déshérités.

On ne peut pas imposer un(e) candidat(e) dont les gens ne veulent pas. Hillary, malgré ses qualités incontestables, était impopulaire, les électeurs ne l'aimaient pas, ils l'ont crié cette nuit. Bernie Sanders, l'avait senti, qui d'une certaine manière, incarnait chez les Démocrates une colère équivalente.

L'Europe ne peut que s'inquiéter face à un président des USA qui l'ignore, qui avoue sa préférence pour les régimes autoritaires (Poutine ou Erdogan se frottent les mains aujourd'hui). L'Ukraine est la première visée. Quant à la fameuse doctrine de l'OTAN qui jusqu'ici assurait la protection d'un des pays de l'OTAN agressé par l'ensemble des membres, elle sera remise en cause, dixit Trump.

Le monde ne peut qu'être en alerte devant un futur Président qui, de son aveu même, ne connaît rien du fonctionnement d'un Etat, n'a aucun programme clair, qui dispose du bouton nucléaire, et qui va être tout puissant avec un Congrès Républicain, et une Cour Suprême dont il pourra enfin nommer le juge qui fera la différence.

C'est un choc pour les optimistes, qui pensaient que, depuis l'élection de Barack Obama, le monde allait en se pacifiant, le racisme était en recul, qu'après un Président noir, on pourrait voir une femme présidente du plus puissant Etat du monde. C'est aussi une défaite de huit ans d'Obama dont les actes fondateurs risquent d'être remis en cause, et notamment cette couverture santé dont on croyait qu'elle était le signe d'une plus grande prospérité et d'une plus grande fraternité.

C'est un avertissement pour la France aussi qui rentre dans une période de turbulence électorale. Attention aux sondages trompeurs. Attention à ceux qui regardent le monde avec les lunettes d'hier. Attention aux signaux de rejet d'une population soumise comme les autres à une ouverture au monde qu'elle ne comprend pas toujours.

Après tout, la France a su garder son cap quand l'Amérique basculait dans la guerre en Irak. De Gaulle, Mitterrand, Chirac ont su tenir tête à une Amérique loin de nous. Peut-être est-ce à la France de montrer qu'elle peut être à la fois réaliste, mais raisonnable et déterminée. Qu'elle voit les drames, les peurs, mais qu'elle n'en rend pas responsable ceux qui ont trouvé refuge chez nous quand la misère ou la guerre était encore plus grandes chez eux. Je sais que cela s'appelle l'optimisme du désespoir, mais il nous faut réagir.

Notre confiance ira à ceux qui sauront non seulement pointer les maux dont nous souffrons, mais ceux qui proposeront, avec sang froid, un chemin de raison, de lucidité, de générosité. A ceux qui diront que l'Europe a un sens, à condition qu'elle se réforme. A ceux qui diront que notre crise démocratique mérite d'être pensée, et nos modes de fonctionnement réformés. A ceux qui diront que si nous voulons préserver l'école, nos systèmes sociaux, redresser des inégalités criantes, nous avons besoin de solidité, de refus de l'aventure, et d'imagination. Qui saura, ici concevoir une autre façon de faire de la politique ? Sans rejet, sans haine, avec intelligence, et audace ? Qui saura penser différemment, pour éviter le chaos, la peur, le saut dans le vide ? Comme le disait le vieux slogan d'Apple, Think different ! Bon courage à nous.