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Fnac vs Conforama: ce qui attend les salariés et les clients de Darty

Écrit par sur avril 21, 2016

La Fnac et Conforama ont multiplié les surenchères pour racheter Darty ce 21 avril, valorisant l'entreprise plus de 1 milliard, pour le grand bonheur des actionnaires. Mais quid des salariés et des clients?La partie de ping-pong entre la Fnac et Conforama pour racheter Darty n'en finit plus. Hier, mercredi 20 avril, au soir, Conforama a annoncé avoir acquis 19,7% du capital de Darty auprès de Majedie Asset Management Limited, Schroder Investment Management Limited, Standard Life Investments Limited et UBS Asset Management, et avoir relevé son offre de 125 à 138 pence l'action Darty. Tôt ce matin, la Fnac riposte, avec une offre désormais 100% en cash, alors que la précédente se faisait essentiellement en actions, à 145 pence par action Darty, valorisant l'entreprise 779 millions de livres (989 millions d'euros). Elle annonce par ailleurs qu'elle a le soutien des actionnaires Knight Vinke Asset Management LLC et DNCA Finance S.A., qui représentent 22% du capital. Fin du suspense? Non! A 13h18, Steinhoff, la maison mère de Conforama, surenchérit à 150 pence l'action Darty, valorisant le distributeur 1 milliard d'euros. Terminé? Toujours pas! A 14h, rebelote à la Fnac qui annonce avoir acheté des actions pour 5,59% du capital de Darty, et une nouvelle offre imminente à 153 pence l'action. Fin du match pour aujourd'hui, pensez-vous? Que nenni! Steinhoff surenchérit une énième fois à 160 pence par action Darty, valorisant l'entreprise à 1,09 milliard d'euros.


Les actionnaires de Darty se frottent les mains: ils se trouvent donc face à deux offres en cash qui valorisent toutes les deux Darty à 1 milliard d'euros. Voilà de quoi satisfaire Régis Schultz, son DG, qui évaluait cet été, en privé, son entreprise à 950 millions d'euros, alors que la toute première offre de la Fnac plafonnait à 720 millions. Mais pour les autres parties prenantes, quelle est la différence entre les deux offres?

Pour les managers

Même si les équipes dirigeantes de Darty ont noué des relations plus chaleureuses avec celles de Conforama, qu'avec celles de la Fnac, Régis Schultz, DG de Darty, n'est pas maître de son destin. D'abord, car il n'a pas la fonction de Président, endossée par Alan Parker. Mais aussi car ce sont les actionnaires britanniques de Darty qui auront le dernier mot dans l'affaire. Or, leur décision influencera lourdement l'avenir de Schultz. Si c'est la Fnac qui rachète Darty, ce dernier n'a aucune garantie de rester. Les projets d'Alexandre Bompard le concernant restent flous, mais il défend un solide projet industriel pour l'entreprise, qui impliquera sans doute une réorganisation de la direction. Steinhoff, en revanche, souhaite préserver l'autonomie de Darty au sein du groupe, et maintenir l'équipe en place.

Pour les salariés

Les défenseurs de la Fnac assurent que le rapprochement avec Darty est enthousiasmant pour les équipes en place. Selon eux, alors que Conforama et Darty cohabiteraient en toute indépendance au sein du groupe Steinhoff, l'acquisition de Darty par la Fnac impliquerait, elle, une vraie intégration, avec l'ouverture respective de corners Fnac et Darty, l’extension de l’offre de billetterie de Fnac au réseau Darty en France et en Belgique, ou encore la mise en commun des offres omnicanales. Autant de challenges pour les salariés Fnac et Darty.

Mais au-delà de cette perspective, des nuages noirs pointent à l'horizon. La Fnac a annoncé 130 millions d'euros de synergies par an. Selon un bon connaisseur du dossier, la moitié (65 millions) proviendrait de restructuration de personnel. "Dans la distribution, il faut compter environ 50.000 euros par personne, soit 1.300 suppressions de postes!". Et d'ajouter: "Si la Fnac rachète Darty en cash, son niveau d'endettement deviendra dangereux car elle a amélioré sa trésorerie en étirant les délais fournisseurs. A sa dette bancaire de 550 millions d'euros s'ajoute une dette fournisseurs de 800 millions." Pour financer sa contre-offre, la Fnac bénéficie d'une ligne de financement de 950 millions d'euros auprès de son groupement bancaire (Natixis, Crédit agricole, Société générale), auquel elle a fait valoir les bénéfices financiers des synergies. En face, le géant sud-africain Steinhoff affiche un endettement moindre, et aucune volonté de restructuration. Il annonce cependant que ses deux dernières surenchères seront financées grâce à des prêts auprès de Citibank, N.A, London Branch et HSBC.

Pour les clients

Si les synergies annoncées par la Fnac ont de quoi inquiéter les salariés, elles ont tout pour séduire les consommateurs. Le rapprochement avec Darty devrait tout d'abord générer selon l'agitateur culturel des synergies d’achat sur les produits électroniques et électroménagers. Cela pourrait permettre de baisser les prix de vente. En outre, l'union Fnac-Darty sera aussi intéressante en termes d'offre: le groupe évoque la mise en place de corners Fnac dans les magasins Darty pour les produits éditoriaux, et inversement de corners Darty dans les Fnac pour les produits d’électroménager. 

Par ailleurs, l’offre de billetterie de la Fnac, leader français sur ce créneau, serait étendue au réseau Darty en France et en Belgique, offrant davantage de points de vente aux clients souhaitant acheter des places de spectacles ou concerts. Ensuite, Darty et la Fnac possèdent deux puissants sites internet, adossés à deux systèmes de click and collect efficaces. En les mutualisant, les points de retrait disponibles seraient multipliés. Enfin,l'entrée récente de Vivendi au capital de la Fnac élargit davantage encore l'éventail de services à disposition des clients de la Fnac et Darty.

En revanche, à Paris, le regroupement des magasins Fnac et Darty pourrait poser un problème de concurrence. Selon un connaisseur du dossier, c'est pour cette raison que l'Autorité de la concurrence envisagerait la fermeture d'une dizaine de magasins. A l'inverse, en province, le cabinet d'expertise économique Microeconomix souligne que c'est la proximité des réseaux Darty et Conforama qui risque de soulever plus de problèmes de concurrence.