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La gauche se déchire autour d’une laïcité jugée par assez laïque

Écrit par sur janvier 20, 2016

Lundi soir devant le Conseil représentatif des institutions juives de France, le Premier ministre Manuel Valls a sévèrement recadré le président de l'Observatoire de la laïcité, Jean-Louis Bianco. Dernier épisode de la bataille qui oppose deux visions de la laïcité, sur fond de lutte contre l'islamophobie et l'antisémitisme.

Le torchon brûle entre Matignon et l'Observatoire de la laïcité. Lundi soir, à l'occasion d'une conférence-débat organisée à Paris par Les Amis du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France), le Premier ministre a vivement critiqué Jean-Louis Bianco, le président de l'Observatoire de la laïcité, et son rapporteur, Nicolas Cadène.  

Motif du courroux de Manuel Valls? La signature par les deux hommes d'un texte publié après les attentats du 13 novembre "pour condamnerle terrorisme". Cet appel, baptisé "Nous sommes unis", a également été approuvé par des organisations dont le Premier ministre considère qu'elles participent à un "climat nauséabond", car animées par des militants réputés proches des Frères musulmans. "L'observatoire de la laïcité de Jean-Louis Bianco a dépassé des lignes et je le rappellerai à chacun", a sévèrement taclé Manuel Valls, avant d'ajouter: "L'Observatoire de la laïcité, placé d'ailleurs sous ma responsabilité, ça ne peut pas être quelque chose qui dénature la réalité de cette laïcité." 

Un feu nourri de critiques

Ces propos de Manuel Valls ne sont que la dernière attaque en date contre le président de cet organisme, ancien ministre socialiste, qui concentre depuis plusieurs semaines sur sa personne un feu nourri de critiques, y compris et surtout de son propre camp politique, illustration de l'opposition virulente entre deux visions de la laïcité, et deux gauches.  

Une bataille ravivée le 6 janvier, alors qu'Elisabeth Badinter participait à la matinale de France Inter. Agacé par les propos de la philosophe sur la neutralité religieuse dans l'espace public (qui n'est pas dans la loi de 1905), le rapporteur de l'Observatoire de la laïcité poste ce tweet:  

Lundi soir devant le Conseil représentatif des institutions juives de France, le Premier ministre Manuel Valls a sévèrement recadré le président de l'Observatoire de la laïcité, Jean-Louis Bianco. Dernier épisode de la bataille qui oppose deux visions de la laïcité, sur fond de lutte contre l'islamophobie et l'antisémitisme.

Le torchon brûle entre Matignon et l'Observatoire de la laïcité. Lundi soir, à l'occasion d'une conférence-débat organisée à Paris par Les Amis du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France), le Premier ministre a vivement critiqué Jean-Louis Bianco, le président de l'Observatoire de la laïcité, et son rapporteur, Nicolas Cadène.  

Motif du courroux de Manuel Valls? La signature par les deux hommes d'un texte publié après les attentats du 13 novembre "pour condamnerle terrorisme". Cet appel, baptisé "Nous sommes unis", a également été approuvé par des organisations dont le Premier ministre considère qu'elles participent à un "climat nauséabond", car animées par des militants réputés proches des Frères musulmans. "L'observatoire de la laïcité de Jean-Louis Bianco a dépassé des lignes et je le rappellerai à chacun", a sévèrement taclé Manuel Valls, avant d'ajouter: "L'Observatoire de la laïcité, placé d'ailleurs sous ma responsabilité, ça ne peut pas être quelque chose qui dénature la réalité de cette laïcité." 

Un feu nourri de critiques

Ces propos de Manuel Valls ne sont que la dernière attaque en date contre le président de cet organisme, ancien ministre socialiste, qui concentre depuis plusieurs semaines sur sa personne un feu nourri de critiques, y compris et surtout de son propre camp politique, illustration de l'opposition virulente entre deux visions de la laïcité, et deux gauches.  

Une bataille ravivée le 6 janvier, alors qu'Elisabeth Badinter participait à la matinale de France Inter. Agacé par les propos de la philosophe sur la neutralité religieuse dans l'espace public (qui n'est pas dans la loi de 1905), le rapporteur de l'Observatoire de la laïcité poste ce tweet:  Sur son compte Twitter, Nicolas Cadène essuie alors des attaques parfois très virulentes. Deux camps s'affrontent: la gauche "Bianco" vs la gauche "Badinter". Une semaine plus tard, le lundi 11 janvier, trois membres de l'Observatoire de la laïcité -Jean Glavany (député PS), Françoise Laborde (sénatrice PRG), Patrick Kessel (président du Comité Laïcité République)- publient un communiqué dans lequel ils dénoncent le tweet du rapporteur de l'Observatoire de la laïcité qu'ils qualifient de "dérisoire, risible et inacceptable". Et d'annoncer qu'ils suspendent leur participation aux travaux de l'Observatoire de la laïcité "tant que le rapporteur général ne se sera pas excusé ou qu'il n'aura pas été désavoué".  

Pétition contre pétition

Episode suivant le mardi 12 janvier, quand une pétition est mise en ligne pour réclamer la tête de Jean-Louis Bianco. Porté par la présidente de l'Observatoire de la laïcité du Val-d'Oise, Laurence Marchand-Taillade (PRG), et par le journaliste franco-algérien Mohamed Sifaoui, le texte qui l'accompagne accuse l'ancien ministre de "privilégier les accommodements irraisonnables et le repli communautariste au détriment de l'esprit d'une véritable République laïque, diverse et métissée". Tout comme Manuel Valls quelques jours plus tard, ils lui reprochent également d'avoir signé la pétition du collectif "Nous sommes unis" où figurent, parmi les 90 signataires, des personnalités désignées comme "une partie du gratin de l'islam politique": des représentants de "l'obscur CCIF" et du Collectif des musulmans de France. Des accusations qui indigent Samuel Grzybowski, 23 ans, fondateur du mouvement de jeunesse interreligieux Coexister, initiateur du collectif "Nous sommes unis". A L'Express, il rappelle les conditions de la naissance du texte signé par Jean-Louis Bianco: "L'idée est née dans la nuit qui a suivi les attentats du 13 novembre. Avec d'autres amis sur Twitter nous avons fait émerger le hasthag (mot-clé)#Noussommesunis. Face à son succès, j'ai eu l'idée de rédiger un texte qui nous rassemble. Très vite j'ai contacté Jean-Paul Delevoye (alors encore président du CESE), Christine Lazerges (présidente de la Commission nationale consultative des droits de l'homme), et Jean-Louis Bianco. Avant même que la version finale de notre texte ne soit publiée dans Libération, des responsables d'associations et d'organisations de tous horizons nous ont contactés pour le signer."  

Parmi ces personnalités, Samy Debbah, (président du Collectif contre l'islamophobie en France), Nabil Ennasri (président du Collectif des Musulmans de France), ou encore le rappeur Medine, montrés du doigt par Laurence Marchand-Taillade et Mohamed Sifaoui. "Même si nous n'étions pas nécessairement d'accord avec les positions de ces signataires, reconnaît Samuel Grzybowski, nous avons finalement décidé de les accepter dans le collectif. Parce qu'ils étaient très motivés et parce que c'est bien l'idée qui nous anime: nous rassembler au-delà de nos différences." 

"Le Premier ministre a-t-il lu la liste des signataires?"

"On a fait un travail impeccable avec ce collectif se défend également Jean-Louis Bianco auprès de L'Express. 90 personnalités très diverses et respectables ont signé notre appel, et je ne vois pas comment le Premier ministre peut me rapprocher de l'avoir signé moi aussi. A moins qu'il n'ai pas pris le temps de lire la liste de ses personnalités?". Une hypothèse plausible puisque parmi les signataires de l'appel dénoncé par Manuel Valls devant le Crif figurent des membres… du Crif, et le grand rabbin de France. Mais aussi le président de la Fondation Abbé Pierre, l'association ATD Quart monde, la Ligue de l'enseignement, la Ligue des droits de l'homme, des responsables syndicaux (CFDT, FSU, Unsa) et des responsables religieux (la Fédération protestante de France, le secrétaire général de l'enseignement catholique). 

Mardi matin dans un communiqué, Jean-Louis Bianco a répondu aux critiques de Manuel Valls, en rappelant notamment que l'Observatoire de la laïcité n'est pas sous sa responsabilité, "(le Premier ministre) méconnaît la réalité des institutions indépendantes dans la République", écrit le président de l'Observatoire regrettant également que celui-ci ne l'ait pas appelé avant de le critiquer publiquement. A L'Express, il précise: "J'aurais plutôt attendu du Premier ministre qu'il me félicite d'avoir signé cet appel. Il y a dans cette affaire beaucoup de mauvaise foi. La réalité, c'est que nous observons dans notre pays une montée des actes anti-musulmans, et des actes antisémites. La vraie question est: qu'est-ce qu'on fait contre ça?" 

Mardi soir, un peu plus de 3700 personnes avaient signé la pétition demandant la démission de Jean-Louis Bianco. En parallèle, tout au long de la journée, les soutiens de la part des signataires de "Nous sommes unis" au président de l'Observatoire de la laïcité se sont multipliés. Le collectif a également demandé à être reçu par le Premier ministre "pour une explication".