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Le père du troisième kamikaze du Bataclan : «Si j’avais su, je l’aurais tué avant»

Écrit par sur décembre 9, 2015

Il est sous le choc, «dans les vapes», depuis qu'il a appris ce mercredi matin «par les médias» que son fils cadet, Foued, avait été identifié comme le troisième terroriste ayant pris part à l'attaque du Bataclan à Paris au soir du 13 novembre.Certes, Saïd Mohamed-Abbag savait son fils radicalisé, et prêt à tout. «Il nous avait menti, faisant croire qu'il partait en vacances, pour se rendre en fait en Syrie il y a deux ans, se souvient Saïd. Depuis 2013, je n'en dormais plus.» Dans ses pires cauchemars, Saïd Mohamed-Abbag pensait que Foued «mourrait en Syrie ou en Irak, pas qu'il reviendrait pour faire ça…»

La dernière fois qu'il a eu de ses nouvelles, c'était «il y a quatre ou cinq mois, via Skype. Comme d'habitude, il ne disait rien de son quotidien, d'où il était ou de ce qu'il faisait. Il répondait juste ça va, ça va, parlait souvent du djihad…» Au fil du temps, les liens père-fils s'étaient estompés, pour quasiment disparaître. «Que voulez-vous faire ? Ce n'était plus lui, c'était une autre personne avec qui je parlais. Quelqu'un à qui on avait lavé le cerveau. ça ne servait plus à rien de communiquer…»

«Franchement, on n'a rien vu venir»Pourtant, rien dans son enfance ne laissait penser que le jeune Foued pourrait un jour connaître un tel destin. «C'était un enfant calme, se souvient son père. Il est né ici, a grandi en France, a été scolarisé en France.» En 2013, comme son frère Karim, parti en même temps en Syrie, et aujourd'hui incarcéré à Strasbourg depuis son retour au printemps 2014, Foued avait commencé à se laisser pousser la barbe. «Il s'était mis aussi à faire sa prière, évoque son père, mais de là à imaginer ce qui se passerait ensuite… Franchement, on a rien compris à tout ça, rien vu venir.»

Comme d'autres familles de ce groupe de dix jeunes strasbourgeois partis en Syrie, Saïd Mohamed-Abbag n'a pu que constater les dégats, impuissant. «Il vivait avec sa maman, je ne l'avais pas sous mon toit. Je ne pouvais rien faire.» Au fil du temps, alors que Foued était le seul du groupe à être resté sur place, son père s'était résolu à l'inéluctable. «Chaque fois, je m'attendais à ce que l'on m'annonce sa mort, dans un bombardement, ou pour une autre raison. J'aurais préféré qu'il meurt là-bas, plutôt qu'ici.»

Sa voix tremble, Saïd réprime un sanglot. «Quel être humain peut faire ce qu'il a fait ?, s'interroge-t-il à haute voix. Si j'avais su qu'il commettrait un jour une chose comme ça, je l'aurais tué avant.»