La Poste, partiellement condamnée en décembre pour avoir manqué «à son devoir de vigilance», annonce avoir fait appel de la décision
Écrit par Jonathan PIRIOU sur mars 11, 2024
La Poste, partiellement condamnée en décembre pour avoir manqué «à son devoir de vigilance» qui oblige les multinationales à rendre des comptes sur les risques humains et environnementaux de leurs activités et celles de leurs filiales et sous-traitants, a annoncé avoir fait appel de la décision. Assignée en 2021 par le syndicat Sud PTT pour les conditions d’emploi de travailleurs sans papiers au sein de ses filiales, l’entreprise publique a été partiellement condamnée le 5 décembre par le tribunal judiciaire de Paris, une première en France.
Ce dernier l’avait enjointe de compléter son plan de vigilance «par une cartographie des risques», ne l’estimant «pas conforme aux exigences légales en raison de son imprécision». Il a demandé en conséquence à La Poste «d’établir des procédures d’évaluation des sous-traitants en fonction des risques» qui seraient identifiés par cette cartographie. En revanche, les juges «ont débouté le syndicat Sud PTT de toutes ses demandes relatives aux mesures de sauvegarde et de vigilance complémentaires concernant la sous-traitance» mais aussi «la lutte contre le travail dissimulé», avait souligné La Poste en décembre.
«La Poste considère nécessaire de faire appel pour clarifier certains points d’interprétation et d’application de la loi sur le devoir de vigilance» de 2017, «en l’absence de décret précisant les modalités d’application de cette loi, et particulièrement dans l’hypothèse où la directive européenne sur le devoir de vigilance ne serait in fine pas adoptée», considère l’entreprise dans un communiqué. Les Vingt-Sept, freinés par l’Allemagne et l’Italie, ont échoué fin février à s’entendre sur une législation imposant aux entreprises de l’UE des obligations relatives à la protection de l’environnement et aux droits humains dans leurs chaînes de production. En France, une loi a été adoptée en 2017, contraignant les grandes sociétés à publier un plan de vigilance sur les risques humains et environnementaux de leurs activités, y compris au sein de leurs filiales, fournisseurs et sous-traitants.
Face à «l’émergence» de contentieux liés au devoir de vigilance et à la responsabilité environnementale des entreprises, la cour d’appel de Paris vient de se doter d’une nouvelle chambre spécialisée. Le groupe dirigé par Philippe Wahl a également argué qu’il apparaissait «utile que la première décision au fond qui intéresse de nombreuses entreprises françaises assujetties à cette loi fasse l’objet d’une analyse par cette juridiction spécialisée. Et ce, «a fortiori si l’harmonisation du cadre juridique européen devant être apportée par la directive ne se réalisait pas», a-t-il affirmé.