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Affrontements à Dijon: la chronologie de sept jours de violences

Écrit par sur juin 16, 2020

Le calme est revenu lundi soir à Dijon après deux jours d’affrontements entre des membres de la communauté tchétchène et des habitants du quartier lors d’expéditions punitives. Laurent Nuñez, le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Intérieur, est sur place ce mardi, tandis que des renforts policiers et notamment le Raid, sont arrivés sur place.

Après un week-end d’affrontements, le calme est revenu lundi soir à Dijon. Alors que des renforts policiers ont été déployés, dont des gendarmes mobiles et le Raid, Laurent Nuñez, le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Intérieur se rend sur place ce mardi matin. Christophe Castaner a jugé “inadmissibles” les “violents troubles à l’ordre public et les actes d’intimidation” de ces derniers jours, promettant “une réponse ferme”.

Expéditions punitives, scènes de guérilla urbaine avec des attroupements d’hommes masqués et armés…. en quelques jours, la situation est devenue explosive dans cette ville peu habituée à ce genre de troubles. Des hommes, cagoulés pour la plupart, ont tiré en l’air, détruit des caméras de vidéo-protection et incendié poubelles et véhicules, et ces scènes ont été filmées et publiées sur les réseaux sociaux. Comment en est-on arrivé à ce niveau de tension? 

Une enquête a été ouverte pour “tentative de meurtre en bande organisée”, “violences volontaires”, “dégradations aggravées” et “incitation à la violence”. Elle a été confiée à la sûreté départementale et à la police judiciaire. Il n’y a pas eu d’interpellation à ce stade. Une source judiciaire fait état d’au moins six blessés liés à tous ces épisodes. BFMTV.com revient les sept jours qui ont conduit à ces scènes de violences dans le quartier populaire des Grésilles.

  • Mercredi 10 juin

L’élément déclencheur de ces violences semble être, de l’avis du procureur de Dijon Eric Mathais, l’agression d’un jeune Tchétchène par “un membre de la communauté maghrébine”. Selon la communauté tchétchène, l’adolescent âgé de 16 ans, habitant le quartier des Grésilles, a été passé à tabac et menacé avec une arme dans la bouche par des dealers en raison de son origine.

La famille n’a pas porté plainte immédiatement “par peur de représailles”, selon les versions recueillies par BFMTV. Une enquête en flagrance a été ouverte pour “violences volontaires sur mineur” afin de vérifier l’exactitude de ces faits.

  • Vendredi 12 juin

Vers 23 heures ce jour-là, une centaine d’hommes, la plupart le visage masqué et armés de barres de fer, de couteaux, ou d’objets de même type, font une descente dans un bar à chicha, le Black Pearl. Ce sont des Tchétchènes, venus venger l’adolescent et mener une opération d’intimidation dans ce lieu qu’ils considèrent être le repaire des dealers. Ils saccagent tout à l’intérieur, et blessent trois personnes.

Sur place, les premiers policiers font usage de lacrymogène pour tenter de maîtriser la situation. Selon une source policière, les Tchétchènes se sont alors présentés à eux, sans hostilité, en expliquant avoir eu “une affaire à régler”, “une expédition punitive afin de rendre justice” à l’adolescent. Et sont repartis. Une source policière indique que dans ce contexte particulièrement dangereux, aucune interpellation n’était possible, mais précise que les Tchétchènes ne se sont jamais montrés violents envers les forces de l’ordre.

  • Samedi 13 juin

Au lendemain de la descente des Tchétchènes dans le bar le Black Pearl, des dealers et des habitants du quartier des Grésilles menacent la communauté. Ils passent l’après-midi à “patrouiller” dans le quartier et s’en prennent sur les réseaux sociaux à toute personne d’origine tchétchène. Face à ces menaces, un appel est lancé au sein de la communauté tchétchène pour qu’ils viennent en renfort, nombreux, à Dijon. L’appel est entendu à la fois dans les départements alentours, mais aussi plus loin en France.

Vers 23 heures, un attroupement se forme devant le fast food Planet Pizza rue d’York, dans le quartier des Grésilles. Les policiers identifient les personnes présentes et comprennent qu’il s’agit de discussions entre un représentant de la communauté tchétchène et un représentant de la communauté maghrébine avec d’autres jeunes autour. L’attroupement se disperse, et les Tchétchènes, au nombre d’une cinquantaine, repartent en voiture. Leurs plaques d’immatriculation sont masquées par du scotch.

Une demi-heure plus tard, une fusillade éclate au même endroit. Selon une source policière, deux hommes sont arrivés dans un véhicule volé, en sont descendus et ont fait feu. Un homme est grièvement blessé par balle, il est le gérant du Planet Pizza. Il est hospitalisé dans un état grave. L’enquête ouverte pour “tentative de meurtre en bande organisée” doit déterminer d’où venaient les tirs. Le véhicule a été retrouvé incendié plus tard dans la soirée.

  • Dimanche 14 juin

Le dimanche est marqué par une nouvelle expédition punitive. Les Tchétchènes reviennent, ils sont près de 200 cette fois-ci. Ils se rendent lourdement armés dans le quartier des Grésilles. Une voiture folle fait un rodéo sous leurs yeux et le conducteur manque de percuter certains d’entre eux. Il braque le volant et fait des tonneaux. Les deux personnes à bord sont grièvement blessées.

Ce soir-là, la sécurité publique de la ville a été rejointe par 37 CRS et des renforts de BAC et de gendarmerie. Aucune interpellation n’est réalisée pour ne pas envenimer la situation. Les membres de la communauté tchétchène repartent.

  • Lundi 15 juin

Des habitants du quartier des Grésilles, pour la plupart masqués plupart et armés, vandalisent du mobilier urbain et incendient des véhicules. Ils disent vouloir défendre les lieux et intimer aux Tchétchènes de ne plus revenir. Sur des vidéos, on les voit tirer en l’air avec des armes de type kalachnikov. Selon une source policière, il pourrait donc s’agir de véritables armes. L’enquête judiciaire doit le déterminer.

Lundi soir, des renforts ont été déployés pour sécuriser les lieux avec 60 gendarmes mobiles, 40 CRS, des effectifs de BAC ainsi que le RAID. La situation est revenue au calme. Hier, au téléphone, le maire de la ville notait que les dégradations autres que celles du bar à chicha étaient le fait de Dijonnais et pas des Tchétchènes venus dans la ville. 

Selon le maire de la ville, François Rebsamen, les violences de lundi sont du fait des jeunes habitants du quartier. “Il n’est pas tolérable que des milices d’auto-défense se mettent en place dans le quartier”, a martelé l’édile sur BFMTV, appelant “tout le monde à rentrer”.