Coup de projecteur sur le futur avion de combat européen au 53e salon du Bourget
Écrit par Jonathan PIRIOU sur juin 17, 2019
La 53e édition du salon aéronautique du Bourget a débuté lundi matin sous le signe de l’avion de combat européen du futur, avec la signature d’un accord-cadre entre la France, l’Allemagne et l’Espagne sur cet ambitieux projet phare pour la défense européenne.
Le président français Emmanuel Macron a assisté au dévoilement d’une imposante maquette grise aux lignes effilées et à aile delta esquissant les possibles traits du futur chasseur (NGF, Next Generation Fighter), au cœur du « système de combat aérien du futur » (SCAF) destiné à remplacer les actuels Rafale et Eurofighter d’ici à 2040.
Un accord-cadre signé
Les ministres française des Armées, Florence Parly, et allemande de la Défense, Ursula Von der Leyen, ainsi que leur homologue espagnole Margarita Robles ont signé sur le stand de l’industriel Dassault un accord-cadre appelé à structurer les relations entre les trois pays autour du projet SCAF, qui associera avion de combat, drones, futurs missiles de croisière et essaims de drones.
Ce projet prend désormais une dimension résolument européenne : l’Espagne a rejoint officiellement le programme ce matin », s’est félicitée Florence Parly.
Reste pour Paris et Berlin à annoncer le lancement des études de recherche et développement pour un montant de 150 millions d’euros sur deux ans, destinées à jeter les bases d’un démonstrateur d’ici 2026. Ce contrat devrait être finalisé « au deuxième semestre 2019 », a assuré Florence Parly.
Autre obstacle à franchir : la France et l’Allemagne doivent encore tomber d’accord sur des règles communes d’exportation.
Faire avancer l’Europe de la défense
Le système aérien de combat du futur est au cœur de l’ambition d’Emmanuel Macron de faire avancer l’Europe de la défense, alors que les Etats-Unis vendent déjà leur F-35 à plusieurs pays européens.
« Notre autonomie politique et opérationnelle repose d’abord sur une autonomie technologique et industrielle. Cela veut dire développer une industrie européenne. Que les trois quarts des pays européens achètent américain, ce n’est plus envisageable aujourd’hui », a martelé la ministre française des Armées.
Arrivé au Bourget à bord du nouvel avion ravitailleur de l’armée de l’Air française, l’A330 MRTT Phénix, Emmanuel Macron a assisté à un défilé aérien avant de visiter plusieurs stands. Il a rencontré sur son parcours l’astronaute français Thomas Pesquet.
Construire des avions moins polluants
L’urgence climatique et les questions de sécurité, avec la crise de l’avion vedette de Boeing, le 737 MAX, figurent parmi les autres gros dossiers de cette grand-messe internationale du secteur.
Sur le plan de l’aéronautique civile, ce 53e salon du Bourget se tient sous des auspices plutôt favorables en termes de croissance du trafic aérien, avec un doublement prévu d’ici 20 ans de la flotte d’avions dans le monde, à 44.000 appareils selon les projections de Boeing. Mais les industriels du secteur sont appelés à redoubler d’efforts pour construire des avions moins polluants et atteindre l’objectif de réduire de moitié les émissions de dioxyde de carbone (CO2) en 2050 par rapport au niveau de 2005, sous l’exigence environnementale croissante des jeunes générations.
Emmanuel Macron a appelé lundi à « ne pas commencer à faire de l’anti-avion ». « L’avion, il faut le moderniser », a-t-il déclaré à des journalistes, en souhaitant « une industrie en Europe plus ambitieuse sur le plan industriel et technologique ». « Notre rôle est de s’assurer que tout le monde nous suit et qu’on n’a pas des Chinois et des Américains qui ne respectent pas les mêmes règles du jeu (en matière de réduction des émissions en CO2, NDLR) et qui en quelque sorte gagnent de la compétitivité parce qu’ils sont moins écologiques », a-t-il ajouté.
Le transport aérien contribue à hauteur d’au moins 2 % aux émissions mondiales de CO2. Selon des chiffres de l’Agence européenne de l’environnement, ses émissions de dioxyde de carbone dépassent largement celles des autres modes de transport.
Un salon compliqué pour Boeing cette année
Côté constructeurs, le salon, habituellement l’occasion pour Airbus et Boeing de rivaliser en termes de nombre de commandes, sera un exercice compliqué pour l’avionneur américain. Les dirigeants de Boeing ont réitéré lundi leur acte de contrition après les deux crashs du 737 MAX, qui ont fait 346 morts. Tous les exemplaires de cet avion en service sont cloués au sol depuis mars.
« Nous sommes sincèrement désolés pour les pertes de vies humaines », a déclaré Kevin McAllister, le patron de la branche aviation commerciale du géant de Seattle. « La sécurité est sacrée dans cette entreprise », a-t-il ajouté en assurant que Boeing mettait tout en place pour faire en sorte que « de tels accidents ne se reproduisent plus jamais », mais ce sont les « régulateurs qui décideront de la date de retour en service » de l’avion, a-t-il indiqué.
Interrogé sur la concurrence avec Airbus, qui a annoncé lundi le lancement d’une version aux capacités étendues de son moyen-courrier A321 XLR, il s’est contenté de répondre que Boeing conservait une « formidable » gamme d’avions.
C’est néanmoins Airbus, jouant à domicile en Europe, qui a ouvert lundi le bal des annonces de commandes, avec huit commandes fermes par Virgin de longs courriers A330-900 au prix catalogue de 2,37 milliards de dollars. Une lettre d’intention pour 100 appareils supplémentaires, dont des A321 XLR, a également été signée avec le loueur ALC.